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La nomination de l’abbé Freppel sur la chaire d’Angers

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La chaire d’Angers était devenue vacante par le décès du pieux et aimable Mgr Angebault, dont la mémoire est encore en vénération dans l’Anjou, qu’il a édifié, instruit et charmé, durant un long et fécond épiscopat.

Le Pape Pie IX, qui venait d’apprécier les grandes qualités et le dévouement de son savant théologien, fit savoir au gouvernement impérial qu’il serait personnellement heureux de le voir recueillir cette succession.

L’Empereur s’honora, en acquiesçant à ce vœu, du père commun des fidèles, et par un décret, en date du 27 décembre 1869, ratifiant, en ce qui le concernait, le choix du Souverain Pontife nomma l’abbé Freppel à l’évêché d’Angers.

Préconisé dans le consistoire du 21 mars 1876, l’Évêque élu ne devait pas tarder à recevoir la consécration épiscopale. Ce fut le lundi de Pâques, 18 avril 1870, à Rome, dans l’église de Saint-Louis-des-Français, que l’abbé Freppel reçut la consécration épiscopale.

La coïncidence de la tenue du concile permit à la plupart des prélats de France, de rehausser, par leur présence, l’éclat d’une si belle cérémonie. En outre, la tribu pontificale se recrutait, ce jour-là, de trois membres nouveaux, car, avec celui que la Providence réservait au diocèse d’Angers, se trouvaient Mgr de Cuttoli, destiné au siège d’Ajaccio, et Mgr Reyne, envoyé dans une de nos colonies françaises. Les trois consacrés étaient jeunes. Hélas ! triste instabilité des vies humaines, les trois élus, aussi bien que les trois consécrateurs, qui étaient le cardinal Donnet, archevêque de Bordeaux, Mgr Guibert, alors archevêque de Tours, et Mgr Rœss, évêque de Strasbourg, sont entrés dans leur éternité.

Le nouvel évêque arrivait, précédé d’une réputation qui rendait déjà le clergé angevin fier de le voir placer à sa tête. Les prêtres, plus adonnés à la science, savaient par cœur les cours de Sorbonne du jeune prélat. Il devait les trouver dans la cellule des professeurs, comme dans les presbytères des studieux, en lieu d’honneur, sur le rayon préféré de leur bibliothèque.

C’est que, à un moment où les meilleurs esprits en France s’étaient engoués de la prétendue science d’Outre-Rhin, au point que certains s’imaginèrent qu’il serait peut-être utile d’envoyer nos jeunes clercs suivre les cours des universités allemandes, au lieu de les envoyer à Rome, centre et gardienne des leçons orthodoxes et des bonnes méthodes, le professeur de Sorbonne, comme l’a si bien dit son panégyriste, « au courant des méthodes germaniques, leur prit ce qu’elles ont de meilleur, l’esprit d’investigation et l’habitude de recourir aux sources. Il n’étaya jamais ses études sur des travaux de seconde main. Mais il se sépara des procédés de la science allemande, par son talent d’exposition et la mise en lumière de matériaux élaborés, classés et présentés avec art à l’esprit. Préparées avec un soin consciencieux, ses leçons, recueillies en volumes compacts, sont abordables à toutes les intelligences cultivées, et constituent une ressource de valeur pour la défense delà foi chrétienne. »

Ceux qui savaient cela, à Angers, se prirent d’enthousiasme pour l’avenir de ce beau diocèse. Ils devinèrent que la science sacrée allait y fleurir d’une floraison réjouissante pour l’Église. Nous verrons bientôt comment leurs pressentiments furent dépassés.

Quant aux jeunes, les échos de Paris leur avaient communiqué quelque chose de l’enthousiaste faveur de la jeunesse de nos grandes Écoles, faveur qui réjouissait le grand et noble cœur de Lacordaire, comme l’a encore rappelé Mgr Gonindard :

« L’auditoire de l’abbé Freppel se recrutait surtout parmi les hommes instruits et les jeunes gens des écoles de la capitale. C’est pour ces derniers que le savant professeur composa ses conférences sur la Divinité de Jésus-Christ.

Le style de cet ouvrage diffère assez sensiblement de celui des autres œuvres de l’apologiste : il est plus chaud, plus coloré, plus brillant. On y sent passer en maint endroit le souffle qui anima l’éloquence de Lacordaire, c’est qu’en effet le célèbre dominicain exerça sur la jeunesse sacerdotale de l’abbé Freppel une grande influence.

Il admirait le prodigieux talent du maître et subissait l’ascendant de ses idées. Plusieurs lettres de l’orateur de Notre-Dame, pleines de paternels et sages conseils en vue de l’avenir du jeune prêtre, attestent la nature des relations qui s’étaient établies entre eux. On sait encore que, pendant quelques années, l’abbé lui confia la direction de sa conscience. »


Ainsi précédé, le nouvel Évêque peut venir : l’ange de l’Église d’Angers l’attend pour lui faire escorte.

« Tout ce que nous avons pu amasser de lumière et d’expérience sur le chemin de la vie, dira-t-il à ses diocésains dans sa première lettre, nous devons l’appliquer à la recherche des moyens les plus propres à augmenter votre bonheur.

Nos journées ne seront pleines qu’autant que le souci de votre avenir éternel en aura rempli tous les instants, et nos années ne compteraient pour rien, si du premier jour jusqu’au dernier, votre progrès dans la sainteté ne restait l’objet constant de nos efforts. L’œil fixé sur la devise que vos ancêtres avaient recueillie de la bouche de Saint Martin pour la placer dans leurs armes :

« Non recuso labo rem », nous n’aurons le droit de reculer devant aucun sacrifice, et notre vie elle-même ne nous appartiendrait plus s’il fallait la donner pour le salut de vos âmes. »

Ces protestations de dévouement absolu et de paternelle tendresse, il les renouvela au jour de son entrée solennelle, quand il monta pour la première fois dans la chaire de sa cathédrale.

« Venez, s’écria-t-il, venez, en toute confiance, votre évêque, dans vos peines et dans vos souffrances : vous trouverez toujours en lui un cœur ouvert à tous les besoins, le ferme et ardent désir de vous être utile, de travailler au salut de vos âmes, de vous offrir de son mieux ses conseils, ses encouragements, ses consolations. »

M. l’abbé Chapot, qui nous paraît avoir bien saisi la caractéristique de cet épiscopat, le fait remarquer avec beaucoup de justesse : Huit gros volumes de lettres pastorales sont là pour attester que Mgr Freppel a été fidèle à ses promesses. Qu’on les parcoure et l’on se convaincra aisément qu’il n’est pas une œuvre charitable à laquelle l’Évêque d’Angers n’ait quelque jour donné l’appui de sa parole féconde, pas une entreprise catholique qu’il n’ait encouragée, pas une grande cause qu’il n’ait défendue, pas un enseignement utile qu’il n’ait donné, pas une question de dogme ou de morale qu’il n’ait opportunément traitée.

Il nous rappelle assez fidèlement la grande figure de Mgr Pie, ou encore celle de Mgr Plantier; il était de l’école de ces illustres évêques qui ne laissèrent passer aucune attaque contre les droits de l’Église, ou contre le moindre point de doctrine, sans faire entendre une victorieuse défense, et qui n’omettaient aucune occasion de nourrir leur peuple d’un enseignement opportun et substantiel.

Citons, parmi ces lettres innombrables, celles qu’il consacre à l’éducation, aux devoirs du chrétien dans la vie civile, à l’observation du dimanche, à l’assistance aux vêpres, à la pratique du Chemin de la Croix, etc., etc.

Entre tous ces discours, signalons ceux qu’il prononça sur les Tombes, sur les Cercles catholiques, sur les Ordres religieux, sur la mission de l’instituteur, etc., etc.

Ajoutons une étude importante sur le Protestantisme, à l’occasion du centenaire de Luther, et qui est une des plus solides et des plus lumineuses apologies de la doctrine catholique. Puisque nous en sommes à énumérer quelques-unes des œuvres oratoires de l’Évêque d’Angers, rappelons, après Mgr le coadjuteur de Rennes, que, si le député se révéla, à la tribune française, avec des ressources infinies, les mêmes ressources d’éloquence se retrouvent dans l’orateur sacré, avec cet avantage que, les sujets étant plus vastes et plus élevés encore, le talent de l’Évêque y prit son vol d’une plus haute et plus large envergure.

Pendant les quinze dernières années écoulées, il n’y a pas eu en France une cérémonie religieuse importante, sans que Mgr Freppel n’ait été appelé à en interpréter la grandeur et les leçons. Les auditeurs, attirés par la réputation du prédicateur autant que par l’éclat de la fête, affluaient par chiffre de mille qui ne se comptaient plus. Malgré leurs dimensions majestueuses, les antiques cathédrales se trouvaient trop étroites pour la foule qui les envahissait.

Quand il parlait en plein air, ce qui lui arriva souvent, sa voix, forte jusqu’à devenir stridente, dominait les flots humains qui se pressaient autour de l’estrade d’où partait l’essor de son génie enthousiasmé.

Cette âme si française a pu satisfaire son patriotisme religieux en célébrant, dans une langue magnifique, la plupart dé nos gloires nationales et chrétiennes. Quelle galerie admirable, il a laissée, de figures saintes reproduites fidèlement par son large pinceau ! Ici sainte Geneviève, sainte Clotilde, sainte Radegonde, sainte Anne nous apparaissent le front nimbé de toutes les auréoles qui nous les rendent si chères.

Ailleurs, saint Hilaire, saint Yves, Urbain II, Vincent de Paul, Grignon de Monfort, Jean-Baptiste de la Salle, le curé d’Ars sont placés avec amour dans le cadre de la prodigieuse influence qu’ils ont exercée sur leur temps. Plus loin, c’est deux fois Jeanne d’Arc, si digne de ce double tribut, puis Jeanne Hachetle, La Moricière, Courbet, Sonis et beaucoup d’autres dont le nom seul fait battre nos cœurs, autant qu’il incline nos fronts dans le respect de l’admiration.

Chacune de ces physionomies héroïques fournit au grand orateur l’occasion de dessiner le tableau de toute une époque, d’en apprécier les événements et d’en dégager les enseignements de l’histoire. En maints endroits, c’est le souffle puissant de Bossuet qui passe.

À côté de ces portraits d’une touche magistrale viennent prendre place des études historiques.et religieuses, que la forme oratoire rend attrayantes : considérations sur la Papauté et son rôle bienfaisant, sur l’épiscopat et sa mission, la gloire de la Sorbonne, le concile du Vatican, les moines, les ordres religieux, les questions ouvrières et sociales.

Il éclaire tout au flambeau de l’Évangile. Mais la France, la France bien-aimée, voilà le perpétuel refrain de son amour inquiet.

« Je sais bien, s’écrie-t-il, que de nos jours, on voudrait tout déchristianiser : mais il est une chose du moins que l’on ne parviendra jamais à dépouiller de son caractère chrétien, c’est l’histoire même de la France…

La France, comme nation ayant sa mission propre, ne se conçoit même pas sans le catholicisme, parce qu’il n’est pas dans le monde entier un intérêt catholique qui ne soit également un intérêt français ; il en a été ainsi de tout temps.

Admirable destinée d’un pays dont l’intérêt se confond avec le devoir, qui, pour rester digne de lui-même, n’a besoin que de se rappeler de sa foi. Oh ! ne t’oublie pas, ô France, patrie bien-aimée ! Souviens-toi de ta longue et glorieuse histoire. Ne prête pas l’oreille aux sophistes qui parlent de séparer ce que Dieu a uni par une alliance indissoluble.»

Et ailleurs :

« Relève ton front, noble pays, aie confiance dans ta vocation divine : non, tu n’as pas achevé ta mission ; car, en disparaissant, tu laisserais un vide que, seule, la toute puissance de Dieu serait capable de combler… Tu reprendras le cours de tes destinées glorieuses, tu resteras au milieu du monde le soldat de la Providence, l’apôtre armé de la foi et de la civilisation chrétienne.

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Comme par le passé, tout ce qui est petit, tout ce qui est faible, tout ce qui se sent opprimé dans l’univers entier, se tournera vers toi pour chercher sur tes lèvres le mot de la délivrance… Puissent tes enfants oublier leurs querelles intestines et se serrer plus étroitement que jamais autour de leur mère, pour n’avoir désormais sur leurs lèvres et dans leur cœur que ces deux mots où tout se résume dans une même foi et dans une commune espérance : Dieu et. la Patrie ! »

Source : Monseigneur de Freppel par Mgr Ricard – 1892

Publié par Napo

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