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Saint Michel et Sainte Jeanne d’Arc au secours de la France

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Le culte de Saint Michel a toujours exercé une influence sociale dans le monde chrétien, surtout en France ; mais cette influence fut plus sensible à l’époque de Jeanne d’Arc.

Un écrivain moderne, célèbre par son impiété, avoue lui-même que l’épisode de Jeanne est inexplicable sans l’intervention de cet esprit céleste qu’elle appelle son Archange. Saint Michel prépara l’humble et modeste vierge de Domremy à sa sublime et difficile mission ; quand l’heure solennelle fut arrivée, il lui fit connaître les desseins du ciel sur la France malheureuse ; il la conduisit au milieu des combats, et, au moment suprême, il recueillit sa belle âme pour la présenter au tribunal de Dieu.

Les Anglais, comprenant cette action mystérieuse de l’Archange sur l’esprit de Jeanne d’Arc et d’un grand nombre de Français, voulurent en paralyser les effets. En plusieurs endroits, ils s’efforcèrent de remplacer le culte du Prince de la milice céleste par celui de Saint Georges, leur patron ; ailleurs, ils essayèrent de se rendre l’Archange propice en lui érigeant des temples et des autels ; leurs souverains firent frapper des pièces d’or et d’argent à l’effigie de saint Michel, dont ils se montrèrent les dévots serviteurs, à l’exemple de nos Rois.

Mais l’Ange tutélaire de la France ne devait pas favoriser des ennemis qui ravageaient notre territoire depuis un siècle, le couvraient de ruines et l’arrosaient de sang.

Le signal de la délivrance fut donné au Mont-St-Michel. Les défenseurs de la place reconnurent qu’ils avaient triomphé par l’aide de Dieu et de Monseigneur Saint Michel, prince des chevaliers du ciel et le succès de leurs armes fut le prélude d’une série de victoires dont la France s’est toujours crue redevable à la protection du belliqueux Archange.

Par une coïncidence d’ailleurs bien-remarquable, pendant que d’Estouteville, à la tête d’une poignée de braves, battait l’ennemi sur les bords de l’Océan, le prince de la milice céleste apparaissait dans la vallée de la Meuse à Jeanne d’Arc, notre libératrice.

Un jour, il lui dit d’une voix pleine de douceur : « Jeanne, sois bonne et sage enfant ; va souvent à l’église. »

Lorsque la petite bergère vit pour la première fois cet Ange au visage resplendissant et aux grandes ailes déployées, elle eut grande peur, et, dans sa frayeur, elle voua sa virginité tant qu’il plairait à Dieu. Mais bientôt la présence de saint Michel ne l’effraya plus.

Quand elle le voyait, il lui était avis qu’elle n’était pas en péché mortel. Un jour, elle l’aperçut entouré d’une troupe d’anges dont la beauté la saisit d’admiration :

« Je les ai vus des yeux de mon corps aussi bien que je vous vois, disait-elle plus tard à ses juges -, et lorsqu’ils s’en allaient de moi, je pleurais, et j’aurais bien voulu qu’ils me prissent avec eux. »

Dans ces premières apparitions, de 1425 à 1428, l’Archange lui montrait « la grande pitié qui était au royaume de France, » sans lui découvrir ouvertement les desseins de Dieu sur son peuple infortuné ; cependant il lui disait déjà qu’elle quitterait un jour sa mère, ses jeunes amies, sa chère vallée, et qu’elle irait au secours du Roi ; puis, pour la guider, il lui envoya Sainte Catherine et Sainte Marguerite. Fidèle à la voix de son ange, la petite Jeanne se donna tout entière à Dieu et lui voua sa virginité.

L’heure était arrivée. En 1428, Jeanne vit l’Archange sous la forme d’un guerrier : « il avait des ailes aux épaules, mais pas de couronne sur la tête ; » il prononça ces mots d’une voix forte :

« Lève-toi, et va au secours du roi de France, et tu lui rendras son royaume.

Messire, répondit Jeanne, je ne suis qu’une pauvre fille ; je ne sais chevaucher, ni conduire des hommes d’armes.

Saint Michel répliqua :

Tu iras trouver messire Robert de Baudricourt, capitaine de Vaucouleurs, et il te baillera des gens que tu conduiras au Dauphin. »

Jeanne d’Arc, la plus simple et la plus timide des jeunes filles, obéit aux ordres de l’Archange ; elle quitta sa famille et tout ce qu’elle avait de cher au monde, alla trouver le sire de Baudricourt, partit de Vaucouleurs et se présenta devant le Dauphin qu’elle reconnut, grâce à l’assistance de ses célestes protecteurs qui l’accompagnaient partout, la fortifiaient et l’éclairaient.

Avant d’engager la lutte avec l’armée qui assiégeait Orléans, elle envoya un message aux Anglais, les invitant à retourner dans leur pays :

« Je suis ici venue de par Dieu, dit-elle, corps pour corps, pour vous bouter hors de toute France. »

Ses paroles ayant été accueillies avec dérision, elle pénétra dans la ville où on la reçut comme une libératrice envoyée du ciel ; aussitôt, avec le brave Dunois, ancien capitaine du Mont-Saint-Michel, elle attaqua les ennemis; le 7 mai, veille de l’apparition de l’Archange sur le monte Gargano, elle remporta une victoire décisive, et le lendemain elle fit lever le siège d’Orléans.

La fête établie pour perpétuer la mémoire de ce glorieux triomphe se célèbre toujours le 8 mai, et l’office chanté est celui de Saint Michel. Ainsi, par une heureuse inspiration, la cité reconnaissante n’a pas voulu séparer l’Archange et la Pucelle, le messager céleste et l’instrument des desseins de Dieu, le Prince de la milice du Seigneur et la vierge de Domremy.

Après la délivrance d’Orléans et plusieurs victoires remportées sur les Anglais, Jeanne alla rejoindre le roi, « son gentil sire, » et le conduisit à Reims où il fit son entrée, le 16 juillet 1429, au milieu d’une foule qui criait dans le transport de son bonheur : « Noël ! Noël ! »

Le lendemain, Charles VII était sacré dans l’ancienne Basilique de nos Rois et la jeune héroïne, surnommée désormais la Pucelle de France, versait des larmes de joie et remerciait « Messire saint Michel » de l’avoir protégée au milieu des combats. À partir de ce jour, nos armées allèrent de victoire en victoire. La France était sauvée.

Jeanne déclara plus tard à ses juges qu’elle avait eu « par Saint Michel, Sainte Catherine et Sainte Marguerite, cette révélation de Dieu, qu’elle ferait lever le siège d’Orléans, couronner Charles, son Roi, et chasserait tous ses adversaires du royaume de France. »

Orléans était délivré et Charles avait reçu l’onction royale, la Pucelle se mit à l’œuvre pour expulser les Anglais de nos villes et de nos provinces; mais elle devait laisser à Dunois l’honneur d’accomplir cette dernière partie de sa mission. Dieu lui réservait à elle-même l’héroïsme du martyre, après l’héroïsme de la bravoure.

Prise à Compiègne et conduite à Rouen, elle fut condamnée par un tribunal inique à mourir sur un bûcher. Le trop célèbre abbé du Mont, Robert Jolivet, siégea comme assesseur parmi ses juges :

« Combien son âme dut souffrir alors, dit monsieur O’Reilly ! La cause de Jeanne d’Arc, c’était la cause du Mont-Saint-Michel, la cause de ses frères et de tous ceux qui persistaient à lutter contre les conquérants. Du moins ne le voit-on intervenir qu’à la fin, à la séance du 24 mai, comme si ce semblant de rétractation eût dû être une excuse pour sa propre lâcheté. »

Dans le cours de ce procès odieux, Jeanne fait connaître ses rapports intimes avec Saint Michel, depuis son âge de treize ans ; et enfin, à l’heure du supplice, quand la terre l’abandonne, elle invoque l’Archange avec la confiance la plus touchante et la piété la plus tendre. Jean Beaupère lui parle-t-il de cette voix mystérieuse qu’elle appelle sa voix :

« Oui, répond-elle sans hésiter, je l’ai entendue hier et aujourd’hui, le matin, à vêpres et à l’Ave Maria, et il m’est plusieurs fois arrivé de l’entendre bien plus souvent… Elle m’a dit de répondre hardiment, et que Dieu m’aiderait. »

« Cette voix, ajoute-t-elle, vient de la part de Dieu, et je crois bien que je ne vous dis pas à plain tout ce que je sais… Cette nuit même, la voix m’a dit plusieurs choses pour le bien du Roi, que je voudrais bien que le Roi sut, quand je devrais ne pas boire de vin jusqu’à Pâques ; car s’il le savait, il en serait plus aise à son dîner. »

Lui demande-t-on quelle était cette voix qui se fit entendre à elle à l’âge de treize ans :

« C’était Saint Michel, s’empresset-elle de répondre ; je l’ai vu devant mes jeux, et il n’était pas seul, mais bien accompagné des anges du ciel. »

Elle refuse d’abord de dire quelle figure il avait ; mais le juge la pressant de ses questions puériles et malséantes, elle répond :

— « Je ne lui ai pas vu de couronne.

Avait-il des vêtements ? » reprend son indigne interlocuteur.

Pensez-vous que Dieu n’ait pas de quoi le vêtir ?, dit-elle, en le rappelant à la pudeur.

Avait-il des cheveux ?

Pourquoi lui seraient-ils couper ?

Tenait-il une balance ?

Je ne sais. »

Dans la dernière séance publique, celle du 3 mars 1431, on revint sur le même sujet :

— « Vous avez dit que Saint Michel avait des ailes ; avait-il aussi une tête naturelle ?

Je l’ai vu de mes yeux, répondit-elle, et je crois que c’est, lui aussi, fermement que Dieu est. »

Plus tard, elle dit encore :

« Oui, je le crois, c’est saint Michel qui vient pour me conforter et me conseiller, et je ne crois pas avec plus d’assurance que Notre-Seigneur a souffert mort pour nous racheter des peines de l’enfer. »

Enfin, l’heure solennelle étant arrivée, Jeanne se mit à genoux devant son bûcher, invoquant Dieu, la Vierge, Saint Michel, Sainte Catherine et Sainte Marguerite, pardonnant à ses ennemis et demandant pardon pour elle-même, disant à l’assistance de prier pour elle, et aux prêtres de célébrer une messe pour le repos de son âme :

« Tout cela, dit un historien, de façon si dévote, si humble et si touchante, que l’émotion gagnant, personne ne put se contenir : l’évêque de Beauvais se mit à pleurer, celui de Boulogne sanglotait, et voilà que les Anglais eux-mêmes pleuraient et larmoyaient aussi, Winchester comme les autres.

Quand la flamme environna la jeune héroïne, les deux vénérables religieux qui étaient présents entendirent encore la voix de Jeanne murmurer le nom de son Archange. »

La mission de Jeanne d’Arc était accomplie. Elle avait songé avec Dunois à se rallier aux défenseurs du Mont-Saint-Michel ; mais ce projet ne put se réaliser. Un accident survenu en 1433, deux ans après la mort de la Pucelle, fit naître dans les Anglais l’espérance de venger leurs défaites et de s’emparer du Mont-Saint-Michel.

Lord Thomas Scales réunit une armée nombreuse avec des machines épouvantables et plusieurs instruments de guerre, entre autres de fortes pièces d’artillerie, et, le 17 juin 1434, veille de Saint-Aubert, il fit tout disposer pour un assaut général.

L’heure solennelle était arrivée. Le soleil dorait de ses premiers rayons le sommet de la montagne, le vent faisait flotter sur les tours l’étendard de Saint Michel et la bannière du Roi de France. Bientôt les bataillons ennemis s’ébranlèrent ; les canons furent dressés sur leurs affûts ; on attendait le signal du combat. Le général anglais fit sommer la place de se rendre ; mais Louis d’Estouteville répondit avec fierté :

« Annoncez à votre maître que nous sommes résolus d’honorer le couronnement de notre légitime souverain, Charles VII, et de lui conserver cette place ou de nous ensevelir sous ses ruines. »

Le général anglais répliqua :

« Superbe étendard, bientôt je t’abattrai dans la poussière. »

Il est rapporté qu’un vieux solitaire de Tombelaine vint lui dire :

« Prenez garde ; on ne s’attaque pas en vain à Monseigneur Saint Michel. »

Il méprisa cet avertissement et commanda le feu. En un moment, la lutte devint acharnée de part et d’autre. Le canon grondait avec force et battait le rempart. Un nuage de fumée enveloppait le Mont-Saint-Michel. Soudain, on entendit un cri de joie retentir dans les rangs ennemis : un pan de muraille s’était écroulé et une large brèche livrait un accès facile aux assaillants.

De nombreux bataillons, soutenus par les compagnies d’archers, se précipitent vers le rempart et s’élancent à l’assaut. D’Estouteville avec ses chevaliers attend de pied ferme. Le silence a succédé au bruit du canon ; on n’entend plus que le cliquetis des armes ; une lutte corps à corps est engagée entre les soldats anglais et les défenseurs de la citadelle.

Quel spectacle ! Un vieux moine témoin du danger s’écrie avec larmes :

« Saint Michel à notre secours ! »

D’Estouteville est environné d’ennemis, il se dégage, monte sur une éminence, saisit l’étendard anglais et le jette dans la poussière, Guillaume de Verdun brise son épée sur la tête d’un adversaire ; aussitôt, il s’arme de sa hache et frappe à coups redoublés. Les assaillants se retirent ; mais un de leurs chefs, l’épée haute et le visage découvert, arrête les fuyards et les ramène à la charge.

Les assiégés font pleuvoir sur eux une grêle de pierres et les repoussent une seconde fois. Huit jours s’étaient écoulés. Les Anglais tentèrent un autre assaut avec toutes leurs forces réunies. Dès le lever du soleil, ils commencèrent à battre le rempart, et bientôt plusieurs brèches furent pratiquées dans la partie basse de la ville.

La garnison fit des prodiges de valeur, mais il fallut céder au nombre et se retirer dans le château. À la vue du danger, plusieurs moines se mêlèrent aux assiégés pour repousser l’assaut et combattirent avec le brave Guiton, Robert du Homme, Guillaume de Verdun, Thomas de Breuilly, et les autres chevaliers.

L’ennemi fut de nouveau culbuté ; la déroute devint complète et le champ de bataille resta au pouvoir des soldats de Saint Michel. Les Anglais perdirent plus de deux mille hommes dans ces derniers assauts et laissèrent de précieuses dépouilles aux mains des Français. Parmi les souvenirs de cette lutte à jamais mémorable, le Mont-Sain-Michel possède encore deux énormes bombardes appelées les Michelettes et dont l’une est chargée d’un boulet de pierre.

Les vainqueurs et les vaincus attribuèrent l’issue du combat à l’intervention « de la Vierge, au glorieux Archange saint Michel, prince de la milice céleste, et à saint Aubert, l’honneur et la gloire des prélats. »

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Les soldats anglais dirent qu’ils avaient aperçu dans les airs, à la tête des assiégés, Saint Michel armé d’un glaive étincelant, et lorsque le Roi Charles VII envoya le comte de Dunois complimenter d’Estouteville et ses chevaliers, il fit déposer un ex-voto dans la Basilique du Mont. À la même époque, l’image de l’Archange brillait sur nos étendards avec ces deux devises : « Voici que Saint Michel, l’un des princes de la milice céleste, est venu à mon secours. Saint Michel est mon seul défenseur, au milieu des dangers qui m’environnent. »

Le salut de la France était assuré grâce à la protection de l’Archange, et les premiers instruments dont le ciel se servit pour arracher nos provinces à la domination étrangère, furent les moines et les chevaliers du Mont-Saint-Michel, avec l’humble vierge de Domremy.

Source : Saint Michel et le Mont Saint Michel – Mgr Germain – 1880

Publié par Napo

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