Si l’on attribue souvent à Constantin le mérite d’avoir ouvert la voie à la christianisation de l’Empire romain grâce à son célèbre édit de Milan en 313, il ne faut pas oublier le rôle décisif joué par un autre empereur, Théodose, qui régna à la fin du IVe siècle, de 379 à 395. C’est sous son règne que l’Empire romain s’engagea pleinement dans la foi catholique, rejetant définitivement les nombreuses hérésies qui sévissaient à l’époque. Pour comprendre l’importance de Théodose, il est nécessaire de revenir sur la situation du christianisme dans les décennies qui précédèrent son avènement.
En 313, Constantin, après sa victoire au pont Milvius, promulgua l’édit de Milan, mettant fin à une décennie de persécutions anti-chrétiennes initiées par Dioclétien en 303. Cet édit accordait aux chrétiens une reconnaissance légale, leur permettant de pratiquer leur culte ouvertement, de posséder des biens et de recourir aux tribunaux romains pour défendre leurs droits. Constantin alla plus loin en exemptant l’Église et son clergé de taxes en 315, et en offrant des terres aux papes. Ces mesures marquèrent un tournant pour le christianisme, lui conférant un statut privilégié au sein de l’Empire.
Cependant, ces actions ne suffirent pas à faire de l’Empire un État chrétien. À l’époque de Constantin, les chrétiens ne représentaient probablement qu’un dixième de la population, et le paganisme restait largement dominant. Après la mort de Constantin, son successeur, Constance II (337-361), adopta l’arianisme et persécuta les clercs catholiques, comme saint Athanase, qui fut exilé et même condamné à mort par contumace. Plus tard, l’empereur Julien (361-363) tenta de restaurer le paganisme, tandis que Valens (364-378) favorisa à nouveau l’arianisme. Ainsi, à la fin des années 370, le catholicisme semblait en déclin, et beaucoup pensaient que l’avenir de Rome appartenait à une synthèse entre paganisme et arianisme.
Tout changea avec l’arrivée au pouvoir de Théodose en 379. Originaire d’Espagne, une région réputée pour son orthodoxie catholique, Théodose hérita d’un empire divisé tant politiquement que religieusement. Dans l’Orient, l’arianisme était puissant, tandis que dans l’Occident, l’empereur Gratien partageait le pouvoir avec Théodose. Les païens, quant à eux, constituaient encore la majorité de la population. Dès son accession au trône, Théodose s’engagea à mettre fin aux divisions religieuses et à établir le catholicisme comme religion officielle.
En 380, il promulgua l’édit de Thessalonique, déclarant que seule la foi catholique, transmise par l’apôtre Pierre et professée par le pape Damase, pouvait être reconnue comme religion légitime. Les hérétiques, qualifiés de « fous insensés », furent privés du droit de nommer leurs assemblées « églises » et menacés de sanctions sévères. Bien que l’efficacité de cet édit dans l’éradication des hérésies soit discutée, il marqua un tournant en faveur du catholicisme, affaiblissant considérablement l’arianisme.
Théodose ne s’arrêta pas là. En 381, il convoqua le deuxième concile œcuménique de Constantinople, qui réaffirma les décisions du concile de Nicée et condamna définitivement l’arianisme. En Orient, il expulsa le patriarche arien de Constantinople, renforçant ainsi l’unité doctrinale entre l’Orient et l’Occident.
Face au paganisme, Théodose adopta une approche plus prudente. Conscient que les païens formaient encore la majorité de ses sujets, il évita les mesures trop radicales. Il interdit cependant certaines pratiques jugées offensantes pour les chrétiens, comme les sacrifices d’animaux et la divination. Les temples païens furent progressivement fermés ou détruits, et les fêtes païennes furent transformées en jours de travail. En 391, Théodose intervint personnellement pour empêcher le Sénat romain, majoritairement païen, de restaurer l’autel de la Victoire, un symbole fort du paganisme.
À la mort de Valentinien II en 392, Théodose devint le dernier empereur à régner sur un empire romain unifié. Durant ses dernières années, il promulgua une série de lois anti-païennes, consignées dans le Code théodosien. Ces textes visaient à éradiquer les hérésies et à punir sévèrement les pratiques païennes. Cependant, leur application resta limitée, et le paganisme persista encore plusieurs siècles, notamment dans les régions éloignées de Constantinople.
Le règne de Théodose marqua un tournant dans l’histoire de l’Empire romain. Bien qu’il ne fût pas un modèle de vertu chrétienne – son massacre des Thessaloniciens lui valut d’être exclu des sacrements par saint Ambroise –, il joua un rôle crucial dans l’établissement du catholicisme comme religion dominante. Grâce à lui, le triomphe de la foi catholique devint inéluctable, achevant ainsi l’œuvre entamée par Constantin.
Par Phillip Campbell pour le Catholic Exchange qui est enseignant en histoire et auteur de nombreux ouvrages sur l’histoire catholique.
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