L’évêque auxiliaire suisse Marian Eleganti a récemment partagé une réflexion sur son blog en abordant la conclusion du Synode sur la Synodalité, un sujet qui nourrit une vive controverse au sein de l’Église. Sur ce thème, il met en lumière les espérances des réformistes et leurs déceptions face aux progrès restreints en matière de réforme ecclésiale, soulignant un certain malaise devant les tentatives de moderniser la structure et la doctrine catholiques. Il n’hésite pas à critiquer une vision réformiste qui, selon lui, pourrait menacer l’unité et l’universalité de l’Église.
Le manque de percée décisive : des espoirs contrariés
Dans son analyse, l’évêque Eleganti constate que le Synode, loin d’avoir instauré des changements profonds, laisse encore beaucoup en suspens. Les modernistes espéraient voir progresser des réformes sur des sujets sensibles, comme l’ordination des femmes au diaconat et une possible prise de décision plus démocratique. Mais, en dépit des nombreux débats, ces sujets n’ont abouti à aucun changement majeur. La possibilité d’ordonner des femmes ou d’autoriser des prêtres mariés est ainsi laissée en suspens, et rien n’indique une évolution prochaine. Cette attente continue rappelle celle d’un « Godot » qui ne vient jamais, créant une frustration palpable dans les rangs réformateurs.
Les réformistes espéraient également une adaptation de l’enseignement de l’Église aux sensibilités culturelles régionales, en particulier concernant les questions de moralité, comme les enjeux LGBT. Mais cette attente se heurte à une volonté de préserver l’universalité de la foi catholique. Mgr Eleganti s’inquiète notamment d’une perte de cohérence si des pratiques et enseignements différents venaient à s’installer selon les régions, suivant un modèle anglican. Il souligne que cela mettrait en danger la « catholicité » de l’Église.
Les diaconesses et la question de l’ordination féminine
Mgr Eleganti évoque également la question du diaconat féminin, sujet très discuté mais qui, d’après lui, reste un rêve inaccessible pour les réformistes. À ses yeux, les « diaconesses » de l’époque patristique n’avaient ni le statut sacramentel ni le rôle pastoral que certains souhaitent aujourd’hui leur attribuer. Ce glissement, cette tentative de réinterpréter le passé pour justifier un diaconat féminin, est vue comme une déformation historique. Il estime que les femmes jouent déjà un rôle essentiel dans la catéchèse, la pastorale et l’assistance spirituelle, mais que l’ordination sacramentelle reste une réalité distinctement masculine.
Une synodalité sur fond de déception
Alors que la synodalité est censée offrir une participation plus large du peuple de Dieu, Mgr Eleganti relève une certaine ironie : malgré les grandes annonces, l’implication des fidèles reste très faible. La participation réelle se limite souvent aux cercles cléricaux ou aux « professionnels » de l’Église. Ce manque d’adhésion populaire soulève des questions, surtout dans des pays comme la Suisse, où l’intérêt pour ces processus semble s’essouffler.
Le Synode a aussi donné lieu à l’instauration de « conseils synodaux » dans certaines régions, un pas de plus vers une gestion plus collégiale de l’Église. Mais Mgr Eleganti reste sceptique face à ces initiatives qui, d’après lui, tournent souvent en rond, sans réelle avancée doctrinale ou pastorale. Selon lui, ce sont souvent les mêmes figures qui réapparaissent, se confortant mutuellement dans des idéaux de réforme, sans toucher profondément la vie du peuple de Dieu.
Le rôle du pape et l’autonomie de l’Église
L’évêque souligne l’influence singulière du pape François, qui reste un acteur décisif du processus synodal. Bien qu’il ait donné une liberté d’expression aux réformateurs, François garde la dernière parole et impose des limites claires. Mgr Eleganti critique ainsi cette forme de liberté apparente, où chaque décision controversée est reportée ou reléguée à des commissions d’étude, ce qui ralentit l’élan réformiste et décourage certains modernistes.
Une Église universelle mise à l’épreuve
Pour Mgr Marian Eleganti, l’Église catholique ne doit pas succomber à une pression démocratique qui viendrait miner l’autorité sacramentelle des évêques et du pape. Il rejette l’idée d’une « démocratie ecclésiale » qui pourrait affaiblir la structure hiérarchique traditionnelle. Mgr Eleganti conclut que, malgré les pressions des réformateurs, l’Église a su préserver sa hiérarchie sacramentelle, rejetant un modèle de gouvernance inspiré des institutions civiles.
En somme, l’évêque suisse offre une perspective critique des espoirs déçus du Synode sur la Synodalité, mettant en garde contre une vision régionalisée qui pourrait diviser l’Église. Ce processus, qui promettait d’ouvrir de nouvelles portes, semble selon lui surtout avoir illustré les limites et les contradictions des aspirations modernistes.