La Conférence épiscopale allemande se réunit aujourd’hui en assemblée plénière, préparant ainsi le terrain pour une rencontre qui s’annonce cruciale dans une période de tension sans précédent au sein de l’Église allemande et avec l’Église catholique dans son ensemble.
L’ordre du jour officiel de la réunion, qui se tiendra du 25 au 28 septembre dans la ville de Wiesbaden, comprend des sujets allant de la gestion des abus spirituels à la préparation du prochain synode sur la synodalité, qui se tiendra à Rome.
Cependant, les discussions sont éclipsées par les questions profondément conflictuelles soulevées par le controversé chemin synodal allemand, en particulier la bénédiction des unions de même sexe – une question qui a donné lieu à des actes de défiance ouverte dans toute l’Allemagne contre les clarifications du Vatican.
Au centre de ce maelström se trouve le cardinal Rainer Maria Woelki, archevêque de Cologne, qui doit faire face à une pression croissante de la part de nombreux acteurs, y compris des médias locaux – et de certains membres du clergé : en signe de défiance ouverte, plusieurs prêtres ont organisé une cérémonie de bénédiction de couples de même sexe à l’extérieur de l’emblématique cathédrale de Cologne le 21 septembre dernier.
Selon AP, la cérémonie a été ponctuée par des personnes chantant la chanson des Beatles “All You Need Is Love” tout en agitant des drapeaux arc-en-ciel.
De telles manifestations, largement couvertes par les médias, constituent un défi pour Mgr Woelki. L’archevêque de Cologne a réprimandé un prêtre pour avoir béni des unions homosexuelles, soulignant que de tels événements ne sont pas possibles, comme l’explique le Vatican.
Cette réprimande a suscité de vives critiques de la part de Birgit Mock, vice-présidente du Comité central des catholiques allemands (ZdK), qui a qualifié les actions de Mgr Woelki de “plus qu’incompréhensibles“. Birgit Mock, qui dirige également le groupe de travail sur la sexualité de la Voie synodale, est une fervente partisane de la bénédiction des unions homosexuelles, ce qui la met en porte-à-faux par rapport à Mgr Woelki et à la position officielle du Vatican.
Le 14 septembre, l’évêque Georg Bätzing de Limburg, président de la Conférence épiscopale allemande, a jeté de l’huile sur le feu en reprochant à Mgr Woelki d’avoir “perdu l’acceptation” des gens, a rapporté CNA Deutsch.
En réponse à la critique du pape François sur la voie synodale allemande, dans laquelle le souverain pontife a déclaré que l’Allemagne n’avait pas besoin de deux églises protestantes, M. Bätzing a déclaré qu’il pouvait, en principe, tolérer la contradiction. Mais “je trouve que la question du protestantisme est irrespectueuse ; je n’étais pas d’accord. Le pape François nous accuse également d’être élitistes, et il entend par là les théologiens. Cependant, on nous envie les théologiens allemands dans l’Église universelle.“
Certains théologiens allemands ont publiquement tourné le dos à la voie synodale.
La récente critique publique du pape François par M. Bätzing intervient après une réunion tenue en juillet à Rome pour tenter de combler les profondes inquiétudes et le fossé grandissant entre les Allemands et Rome.
La Congrégation pour la doctrine de la foi du Vatican a publié une déclaration officielle le 15 mars 2022, affirmant sans équivoque que l’Église n’a pas le pouvoir de bénir les unions entre personnes de même sexe.
Le fait que la bénédiction des unions homosexuelles continue de faire l’objet d’un défi ouvert – soutenu par d’éminents prélats tels que le cardinal Reinhard Marx – est un symptôme de la difficulté des tentatives visant à faire coïncider la voie synodale allemande avec le synode sur la synodalité.
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Les enjeux ne pourraient être plus élevés au moment où les évêques allemands se réunissent à Wiesbaden, et Woelki, dépeint dans certains médias allemands comme une figure polarisante au milieu des tensions, selon CNA Deutsch, pourrait être confronté à un moment critique.
Avec les pressions financières, sociales et théologiques qui s’accumulent dans les diocèses allemands, les décisions prises cette semaine à Wiesbaden pourraient avoir des implications considérables, non seulement pour Woelki et ses frères évêques, mais aussi pour la communauté catholique mondiale qui se prépare à la réunion synodale de Rome.
L’Église allemande est confrontée à un exode d’une ampleur historique. Plus d’un demi-million de catholiques baptisés ont quitté l’Église en 2022, soit le nombre de départs le plus élevé jamais enregistré. Ces départs massifs ont conduit plusieurs évêques allemands critiques à l’égard de la voie synodale, dont Mgr Stefan Oster, évêque de Passau, et Mgr Bertram Meier, évêque d’Augsbourg, à reconnaître que l’Église doit regagner la confiance avec “patience et crédibilité“.
La réunion de Wiesbaden est un carrefour qui permettra de déterminer s’il est possible de parvenir à un accord sur la bonne direction à prendre ou si les craintes d’un nouveau schisme du pays de Luther sont justifiées.