Les Religieuses de Notre-Dame (fondées par saint Pierre Fourier), établies en 1643 à Corbeil, diocèse de Versailles, sous la protection d’Anne d’Autriche et de Louis XIV, se voyant menacées de la dispersion, firent vœu de se consacrer toutes et chacune au divin Cœur de Jésus, et de réciter tous les jours, à neuf heures et à quatre heures, une prière spéciale au Sacré Cœur.
Elles promirent aussi que, tous les dimanches, chacune, à son tour, passerait la journée dans une retraite absolue, honorant le Sacré Cœur et le remerciant de la faveur que l’on espérait bien obtenir. Cet acte fut écrit sur parchemin et signé de toutes les religieuses.
Le divin Cœur répondit à la confiance qu’on lui témoignait. Chassées de leur monastère, les religieuses de Notre-Dame se retirèrent à Boissy, non loin de Corbeil, où elles vécurent toutes ensemble, pratiquant leur règle, du moins dans la mesure du possible.
La récitation du Bréviaire romain ne fut jamais interrompue, ni l’instruction gratuite de quelques enfants. Toutefois, en 1794, le 27 juillet, elles devaient subir la sentence de mort, portée contre elles par le tribunal révolutionnaire ; elles avaient même été obligées de payer « les charrettes » qui devaient les conduire à l’échafaud ! Mais, ce jour-là même, ce fut Robespierre qui y monta, et sa mort sauva les condamnées.
Pendant les années qui suivirent, elles continuèrent paisiblement leur vie religieuse, multipliant leurs actes de dévotion au Sacré Cœur, à qui elles devaient cette grâce insigne. Depuis cette époque, chacune des novices de la communauté, après l’émission des vœux religieux, prononce le vœu d’une dévotion spéciale au Sacré Cœur et promet de maintenir la récitation de la prière de neuf heures et de quatre heures, ainsi que la retraite de chaque dimanche, puis elle appose sa signature sur la précieuse feuille de parchemin, gardée chèrement dans les Archives.
La retraite du dimanche est bien la meilleure journée de l’année pour chacune. Le Cœur de Jésus prodigue ses grâces à sa fidèle compagne, c’est ainsi que l’on nomme l’heureuse retraitante de chaque dimanche.
En 1889, les religieuses fêtèrent très solennellement le centenaire de leur vœu. Le 27 juin 1919, fête du Sacré Cœur, était, jour pour jour, le 130e anniversaire de la consécration de la communauté à ce divin Cœur.
« Nous devons une telle reconnaissance au Sacré Cœur pour les grâces sans nombre dont il comble la communauté, depuis le 27 juin 1789, que nous voudrions le redire à tous ceux qui travaillent à le faire connaître et aimer, afin qu’ils insistent encore davantage sur les promesses que ce bon Maître a faites à ses dévots.
Ainsi, pendant les terribles années de la guerre, nous avons été protégées, miraculeusement, des centaines de fois, ici à Arlon (Belgique), où nous avons été transférées en 1907, lors de notre expulsion de France — nous habitions Verdun depuis 1839.
Au début, nous avions placé une image du Sacré-Cœur sur chacune de nos portes ; or, pas un Allemand n’a séjourné chez nous ; nous avons échappé aux multiples réquisitions, aux pièges des espions, et surtout aux bombes qui sont tombées tout autour de la maison, dans un rayon de moins de cent mètres.
Que le Sacré Cœur en soit à jamais remercié, et qu’il daigne continuer sa protection sur notre communauté ! »
Les Moniales Chartreuses.
Vers 1692, des Moniales (ou religieuses) de l’Ordre des Chartreux, écrivirent à leur Supérieur général, Dom Innocent Le Masson, qu’ « elles avaient eu entre les mains un petit livre, publié récemment en l’honneur du Cœur de Jésus, dans lequel on indiquait certaines pratiques nouvelles, entre autres, un Rendez-vous quotidien dans ce divin Cœur ; puis des prières spéciales, une consécration, une amende honorable ; on demandait, le vendredi après l’octave de la Fête-Dieu, une communion réparatrice pour honorer le Sacré Cœur de Jésus et lui témoigner sa reconnaissance : cette communion réparant les outrages faits à la Sainte Eucharistie, était comme une sorte de fête en l’honneur du Sacré-Cœur. »
Les Moniales demandaient si le R. Père Général voulait bien consentir à ce qu’elles missent en pratique les conseils du petit livre, et elles le lui envoyaient. Dom Le Masson répondit :
« Je ne consens pas seulement que vous mettiez cette sainte dévotion en pratique ; mais je vous y exhorte. »
Il accordait tout et fit plus encore. Il sut trouver le temps pour composer un ouvrage spécial intitulé : Exercice de dévotion au Sacré Cœur de Jésus-Christ, pour les religieuses Chartreuses, calqué sur le petit livre qu’elles lui avaient envoyé, et indiquant, à l’usage de ces religieuses, trois rendez-vous, ou Stations, chaque jour, dans le Cœur du divin Maître.
Le petit livre que la divine Providence fit tomber entre les mains des Moniales et du R. P. Général des Chartreux, c’est le Divin Rendez-vous, composé par la Sœur Jeanne-Madeleine-Joly, à Dijon. Le P. Le Masson fit imprimer son ouvrage en 1694, à la Grande Chartreuse, dans les bâtiments de la Correrie ; jugeant dans la suite qu’il pouvait être mis utilement entre les mains de tous, il confia la seconde édition, en 1696, à un libraire de Lyon.
Pendant longtemps à peu près introuvable, cet opuscule a été réédité en 1886, tel qu’il parut en 1694
L’admirable destinée de ces modestes pages composées par une humble religieuse ! Dès qu’elles paraissent, il semble qu’un signal est donné ; le public s’en dispute les moindres fragments, les éditions se succèdent avec une rapidité qui tient du prodige et la dévotion au Cœur de Jésus se répand de plus en plus « non pas par des paroles ou par de simples affections, mais par des œuvres, et en aimant nos âmes en la manière que Jésus-Christ lui-même nous l’a enseigné, c’est-à-dire, en les perdant pour les immoler à l’amour adorable du Cœur sacré de Jésus-Christ. » (D. Le Masson.)
De temps immémorial, dans beaucoup d’églises, même encore maintenant, on tinte trente-trois coups de cloche, vers neuf heures et vers quatre heures, en mémoire des trente-trois années de la vie mortelle de notre divin Sauveur, afin d’inviter les fidèles à se réunir dans le Cœur de Jésus vivant au saint Tabernacle, pour l’adorer, le remercier, le consoler et le prier.
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C’est ce que les anciens manuels de la dévotion au Sacré Cœur nomment le Signal sacré. Ne pourrait-on pas conserver ou introduire ce pieux usage, au moins le jour où se fait l’Adoration dans chaque église, et aussi le vendredi, surtout le premier vendredi du mois, jour spécialement consacré à honorer le Cœur de Jésus ? C’est aussi à ces deux moments que des prières particulières sont faites dans le sanctuaire de Montmartre, en union avec les églises affiliées, et qu’on y donne le Salut du Très Saint Sacrement.
Source : Révélations de Sainte Marguerite-Marie Alacoque – 1920