Sainte Catherine de Sienne écrit une lettre à Agnolino, afin de combattre contre la chair, le monde et le démon. Agnolino de Salimbeni était un des nobles les plus puissants de Sienne.
Très cher Fils dans le Christ, le doux Jésus, moi, Catherine, la servante et l’esclave des serviteurs de Jésus-Christ, je vous écris dans son précieux sang, avec le désir de vous voir combattre généreusement, et ne pas craindre les coups comme un chevalier sans cœur.
Mon doux Fils, nous sommes sur un champ de bataille, et il nous faut toujours combattre, en tout temps et en tous lieux. Nous avons des ennemis qui assiègent la cité de notre âme : ce sont la chair avec ses jouissances déréglées, le monde avec ses honneurs et ses plaisirs, le démon avec sa malice.
Pour empêcher les saints désirs de l’âme, il l’entoure de pièges, ou par lui-même ou par le moyen des créatures, en mettant sur la langue de ses serviteurs, des paroles trompeuses, des louanges, des menaces, des murmures ou des injures ; et il agit ainsi pour troubler l’âme et la dégoûter de ses bonnes et saintes œuvres.
Mais nous, comme de généreux chevaliers, nous devons défendre et garder la cité ; nous devons fermer la porte aux sentiments déréglés, et y mettre pour garde le chien de la conscience, afin que, quand l’ennemi passe, il aboie, pour que l’intelligence veille et regarde si c’est un ami ou un ennemi, un vice ou une vertu qui se présente. A ce chien, il faut lui donner à boire et à manger ; il faut lui donner le sang pour boisson, et le feu pour nourriture, afin qu’il secoue le froid de la négligence et qu’il soit vigilant.
Oui, je te le dis, mon fils Agnolino, nourris le chien de la conscience avec le feu d’une très ardente charité et avec le sang de l’Agneau sans tache, répandu sur la Croix, de toutes les parties de son corps, pour que nous puissions lui donner à boire ; et en le faisant, il sera plein de vigueur, et vous combattrez bien.
Prenez le glaive de la haine et de l’amour, c’est-à-dire la haine et l’horreur du vice, et l’amour de la vertu ; et la chair, l’ennemi le plus mauvais et le plus perfide que nous puissions avoir, sera tuée en la frappant de ce glaive. La conscience fera voir à l’œil de l’intelligence combien est dangereux le plaisir de la chair qui se présente à l’âme, et pour le tuer elle regardera la chair flagellée de Jésus crucifié, et elle aura honte de s’attacher aux jouissances déréglées et aux délices du corps.
Le démon, avec ses ruses et les pièges qu’il tend pour faire périr les âmes, sera vaincu par la vertu de la véritable humilité. Que le chien de la conscience aboie donc pour tenir l’intelligence éveillée et lui faire voir combien il est dangereux d’écouter les tentations et d’espérer en soi-même.
Que l’homme reconnaisse son néant, afin de ne pas tomber dans l’orgueil : c’est l’humilité qui brise tous les filets du démon. L’homme ne devrait pas avoir honte de s’humilier en voyant son néant, en voyant qu’il tient l’être de Dieu et non de lui-même, et que Dieu s’est humilié jusqu’à lui. Par un acte d’humilité profonde, il est descendu des hauteurs infinies de sa divinité jusqu’à la bassesse de notre chair.
Ce doux et tendre Agneau, le Verbe incarné, est notre force, car c’est de lui que vient tout secours. Il a voulu être notre chef, et avec sa main désarmée, percée et clouée sur la Croix, il a défait tous nos ennemis. Son sang est resté sur le champ de bataille pour nous animer à combattre en bons chevaliers, généreusement et sans crainte.
Le démon est devenu impuissant par le sang de l’Agneau ; il ne peut faire que ce que Dieu permet, et Dieu ne permet jamais que le fardeau soit au-dessus de nos forces. La chair aussi a été vaincue par la flagellation et les tourments du Christ, et le monde par les opprobres, les mépris, les injures et les outrages qu’il a reçus.
La richesse a été vaincue par la pauvreté volontaire de Jésus crucifié. La richesse suprême est devenue si pauvre, qu’elle n’avait pas où reposer sa tête sur le bois de la très sainte Croix. Oui, mon Fils, quand l’ennemi voudra entrer dans ton âme par l’amour des honneurs et des biens du monde, fais en sorte que le chien de la conscience éveille l’intelligence, et qu’elle voie qu’il n’y a ni durée ni stabilité dans les honneurs et les biens du monde, de quelque côté qu’ils viennent.
Vous le savez bien, vous l’avez vu et vous l’avez éprouvé. Et puis je veux que vous compreniez qu’en se donnant d’une manière déréglée à ces choses passagères, on n’arrive pas à la gloire, mais à la honte ; car l’homme devient l’esclave de ce qui est moins que lui ; il sert les choses finies, et il est infini ; car l’homme ne finit jamais quant à l’être, quoiqu’il finisse à la grâce par le péché mortel. Si nous voulons trouver l’honneur, le repos et le contentement, il faut servir et aimer ce qui est plus grand que nous.
Dieu est notre Rédempteur, notre Seigneur, notre Père, la souveraine, l’éternelle Bonté, digne d’être aimé et servi par tous ; c’est une obligation pour nous, si nous voulons participer à la grâce divine. Il est la puissance suprême et le bonheur ; c’est lui qui rassasie l’âme et soutient toute faiblesse ; c’est en lui qu’on trouve la paix, le repos, la sûreté, le rassasiement que rien ne peut donner, parce que toutes les créatures sont moins que l’homme.
Ainsi donc, le mépris du monde est un honneur, une richesse ; mais les fous, les insensés ne le reconnaissent pas, et pensent tout le contraire. Pour vous, comme de généreux combattants, élevez-vous au-dessus des affections sensuelles, et connaissez la vérité. Ne croyez pas les hommes méchants et pervers ; le démon se sert de leur bouche pour nuire à votre vie et à votre salut, pour vous exciter à la colère et vous révolter contre la volonté de Dieu.
N’écoutez pas ces conseillers du démon, mais écoutez et répondez à l’Esprit-Saint, qui vous appelle. Montrez que vous n’hésitez pas, et répondez-leur généreusement ; dites-leur que vous ne voulez pas résister à Dieu, que vous ne pouvez pas.
Je sais ce qui a été dit, et la Comtesse sera bien tourmentée par les uns et les autres, parce qu’elle veut être la servante et l’esclave des serviteurs de Jésus-Christ. Les méchants, pour vous arrêter, elle et vous, voudront vous inspirer des craintes et des regrets ; ils vous présenteront comme une honte et une bassesse le plus grand honneur que vous puissiez avoir, non seulement maintenant, mais pour toujours.
Devant Dieu et devant les hommes, votre gloire surpassera celle de tous vos ancêtres. Que nous serions fous et insensés si nous mettions notre amour et notre espérance dans un feu de paille ? Une grande flamme parut la première fois que vous vous êtes marié, mais elle disparut bientôt, et il ne resta que la fumée de la douleur. Le feu parut ensuite vouloir se rallumer, mais il s’est éteint, le vent de la mort l’a dissipé. Il serait donc bien plus simple, pour elle et pour vous, de répondre à l’appel du Saint-Esprit.
Vous voyez que le monde la repousse et la renvoie à Jésus crucifié. J’espère bien de la Bonté divine que vous n’oublierez jamais la volonté de Dieu, et que vous ne vous laisserez pas entraîner par les jugements du monde.
Fermez, fermez la bouche à vos vassaux, et empêchez leurs murmures, en vous montrant ferme. Je ne doute pas que vous ne le fassiez, si le chien de la conscience ne dort pas, et si l’œil de l’intelligence reste ouvert ; car autrement, vous ne seriez pas un généreux chevalier, et vous montreriez une grande lâcheté. Tout mon désir est de vous voir courageux ; et je vous ai dit que je désirais vous voir bien combattre sur le champ de bataille, surtout dans ce combat nouveau que vous avez à soutenir maintenant au sujet de la Comtesse.
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Le démon voit qu’il la perd, c’est pour cela qu’il vous tourmente tant par les créatures. Mais courage, méprisez tous les jugements du monde, et que Jésus crucifié vive en vous. Je ne vous dis pas autre chose. Demeurez dans la sainte et douce dilection de Dieu. Doux Jésus, Jésus amour.
Source : La vie de Sainte Catherine de Sienne – Bienheureux Raymond de Capoue son confesseur – 1904
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