Dans le document Sacrum Commercium, un traité franciscain précoce sur la Sainte Pauvreté, Saint François d’Assise écrit ce qui suit :
« Alors qu’ils se hâtaient vers les hauteurs à pas feutrés, voici Dame Pauvreté, debout au sommet de la montagne. En les voyant monter avec une telle force, presque en volant, elle fut très étonnée. Il y a longtemps que je n’ai pas vu et observé des gens aussi libérés de tout fardeau« .
Dame Pauvreté les salua avec de riches bénédictions :
« Dites-moi, mes frères, quelle est la raison de votre venue ici et pourquoi passez-vous si vite de la vallée de la douleur à la montagne de la lumière ?« .
Ils répondirent :
« Nous voulons devenir les serviteurs du Seigneur des armées, car il est le Roi de gloire. Aussi, à genoux à vos pieds, nous vous supplions humblement d’accepter de vivre avec nous et d’être notre chemin vers le Roi de gloire, comme vous l’avez été lorsque l’aurore d’en haut est venue visiter ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort« .
De tous les Saints qui ont reçu la grâce de la sainteté par la pauvreté, c’est Saint François que Dieu a glorifié à un niveau presque « all-star« . À partir de ce document, et d’une vie entière consacrée à la servir, nous sommes introduits à Dame Pauvreté, le personnage mystique qui a lié François le plus étroitement au Christ. C’est elle qui l’a aidé à approfondir la béatitude qui allait non seulement le définir, mais aussi d’innombrables personnes qui suivraient son exemple, à savoir : « Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux » (Matt. 5:3).
Si nous cherchons le royaume, nous devons, comme saint François, embrasser Dame Pauvreté.
Mais comment ?
Comment pouvons-nous, en tant que membres d’une société économique remarquablement complexe, atteindre un tel détachement ?
Curieusement, Saint François a anticipé notre question, car sa réponse se trouve dans les mots de sa Règle originale.
La nécessité du travail
-Première Règle des Frères Mineurs, partie 7
« Et que les frères qui savent travailler, travaillent et s’exercent à cet art qu’ils peuvent comprendre, si cela n’est pas contraire au salut de leur âme, et s’ils peuvent l’exercer dignement. Car le prophète dit : « Tu mangeras du travail de tes mains ; tu seras béni, et tu seras heureux » ; et l’Apôtre : « Si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas« .
Le travail n’est pas un mal. Gagner sa vie n’est pas un mal. L’argent en soi n’est pas un mal. Au contraire, le travail, le fait de suivre ses passions, de subvenir à ses besoins et à ceux de ses proches sont essentiels à notre salut.
Le Père séraphique savait que le travail avait une grande valeur, c’est pourquoi il a encouragé ses frères à y participer ouvertement. Il aurait pu les reléguer dans des cloîtres et leur demander de prier et de jeûner pour le salut des âmes, mais il ne l’a pas fait.
Il voulait que son Ordre soit parmi les gens afin qu’ils puissent faire l’expérience de la valeur du travail. Ainsi, ils pouvaient mieux servir ceux qu’ils côtoyaient, car ils savaient ce que c’était que de recevoir les avantages du travail – à savoir la nourriture, le logement et les ressources qui les aideraient (et aideraient les autres) à survivre.
Le pouvoir du détachement
-Première Règle des Frères Mineurs, partie 7
« Et pour leur travail, ils peuvent recevoir toutes les choses nécessaires, sauf l’argent.«
Le danger lié au fait de gagner de l’argent survient lorsqu’on le pousse à un extrême déséquilibré. L’Écriture nous dit que « l’amour de l’argent est la racine de tout mal » (1 Tim 6:10), et non l’argent lui-même. Par conséquent, Saint François ne permettait à sa communauté religieuse de recevoir que ce qui était essentiel à leur survie en échange de leur travail, et rien de plus.
Saint Paul a fait quelque chose de similaire dans son ministère. Dans sa deuxième lettre aux Thessaloniciens, il écrit :
« Car nous n’avons pas agi de manière désordonnée parmi vous, et nous n’avons pas mangé de nourriture reçue gratuitement de quelqu’un. Au contraire, nous avons travaillé nuit et jour, à la sueur de notre front et à la corvée, nous avons travaillé, afin de n’être à la charge d’aucun d’entre vous. Non pas que nous n’en ayons pas le droit. Au contraire, nous avons voulu nous présenter comme un modèle pour vous, afin que vous puissiez nous imiter » (2 Thes. 3, 7-9).
Nous voyons ici la raison première de la présence de Dame Pauvreté parmi les Frères – pour les guider de plus près dans le mystère d’une vie centrée sur l’Évangile. L’Ordre franciscain, comme Paul, travaillera dur pour assurer sa subsistance. Pendant ce temps, leurs ministères d’évangélisation assureraient la subsistance de leurs âmes.
L’importance de l’aumône
« Et quand cela peut être nécessaire, qu’ils aillent demander l’aumône. Qu’ils n’en aient pas honte, mais qu’ils se souviennent que notre Seigneur Jésus-Christ, Fils du Dieu vivant et omnipotent, a posé son visage « comme un rocher dur » et n’a pas eu honte, qu’il a été pauvre et étranger et qu’il a vécu d’aumônes, lui, la Sainte Vierge et ses disciples.«
-Première Règle des Frères Mineurs, partie 9
Jésus nous a dit que nous aurions toujours des pauvres parmi nous (Mat. 26:11). Oui, il y a ceux qui sont pauvres sans le vouloir et il est de notre devoir de les aider en « partageant votre nourriture avec ceux qui ont faim et en ouvrant vos maisons aux pauvres sans abri » (Is. 58:7). Et même si nous réussissons à nous unir pour éliminer complètement la pauvreté, il y aura toujours ceux qui aiment tellement Dame Pauvreté qu’ils choisissent volontairement d’être pauvres afin d’atteindre une dépendance totale de Dieu, les Frères de Saint François en étant un parfait exemple. Comme les pauvres involontaires, ils ont besoin de notre aumône.
En planifiant vos finances au cours des mois à venir, peut-être feriez-vous bien à votre âme de donner un peu plus à ceux qui sont le plus dans le besoin, qu’ils soient volontairement ou involontairement pauvres. Non seulement votre âme bénéficiera de cet acte de charité, mais aussi les autres qui s’efforcent d’atteindre la même sainteté avec Dame Pauvreté qui les guide, et vous guide, vers une lumière plus parfaite.
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Détachement total
Dans le monde d’aujourd’hui, dominé par l’argent, il y a un risque de tomber amoureux de la monnaie. C’est logique puisqu’il s’agit, après tout, du point d’appui de notre existence corporelle. Mais nous ferions bien de considérer que ce que le monde pense « faire tourner le monde » est essentiellement un mensonge ; l’argent ne pourrait jamais soutenir l’orbite ou l’axe de la terre, ses nuits et ses jours, son temps clair ou ses tempêtes. Ce qui fait vraiment tourner le monde, c’est quelque chose de plus grand, de plus simple, d’essentiel – Dieu, qui, avec l’aide de Dame Pauvreté (et d’exemples comme les frères de Saint-François), nous enseigne comment être reconnaissants avec les nécessités de la vie.
Et à considérer tous les extras comme « la poussière que nous foulons sous nos pieds, car c’est ‘la vanité des vanités, et tout est vanité‘ » (Première Règle des Frères Mineurs, partie 8).
Cet article a été publié originellement et en anglais par le CatholicExchange (Lien de l’article).