Message radio du Pape Pie XII aux fidèles de Bretagne, réunis au sanctuaire de Sainte-Anne d’Auray le 17 juillet 1954.
Chers fils et filles de Bretagne, pèlerins de Sainte-Anne d’Auray,
Au moment où le très vénéré et très digne Cardinal Archevêque de Rennes se dispose à lire la consécration qui renouvellera le don de vous-mêmes, de vos familles, de vos malades, de vos écoles, de vos paroisses, au Cœur Immaculé de Marie, le Père de tous les fidèles se rend attentif à cette grande action, il vient vous encourager et vous bénir.
S’il Nous est permis de reprendre à Notre Saint Prédécesseur Pie X les paroles qu’il adressait en 1906 au Cardinal Labouré, Nous voudrions vous dire, en cette circonstance solennelle, qu’« au milieu des haines dont la foi catholique est l’objet », c’est particulièrement de vous que « Nous attendons… la meilleur part de Notre joie ».
La Bretagne, Nous le savons, a toujours été une Terre de Marie, et elle veut le demeurer. Les signes de votre dévotion à la Très Sainte Vierge sont innombrables : dans vos diocèses, combien d’églises lui sont dédiées ; dans les sanctuaires de vos pays, combien de Vierges couronnées reçoivent chaque jour l’hommage de vos prières ; dans vos familles, combien ont reçu au saint baptême le nom de Marie ! Oh ! portez-le tous dans le cœur ce nom béni de la Mère de Dieu ! Honorez-le par votre piété, honorez-le plus encore par votre vie !
Que la consécration solennelle d’aujourd’hui soit pour vous un rempart contre les tentations, un motif de confiance dans la prière, un stimulant dans la lutte de tous les jours au service de Dieu. Quiconque s’est consacré à Marie lui appartient de façon spéciale. Il est devenu comme un sanctuaire de la Très Sainte Vierge ; l’image de Marie l’aide à écarter avec énergie toute pensée mauvaise ; l’amour de Marie lui donne le courage d’entreprendre de grandes choses, de vaincre le respect humain, de secouer l’égoïsme, de servir et d’obéir patiemment.
Le regard fixé intérieurement sur elle, il s’affectionne à la pureté, à l’humilité, à la charité, dont l’âme de la Vierge était rayonnante; il prend en haine le péché, il le combat en lui-même et lui fait la guerre de toutes ses forces. Quand il voit l’Immaculée fouler aux pieds le serpent infernal, quand il contemple la Mère de Dieu qui élève entre ses bras son divin Fils, sa volonté ne peut plus avoir aucune complaisance pour le mal ; au contraire, il est fier d’appartenir à Jésus et à Marie, il sait aussi que Marie le presse de faire tout ce que Jésus commande ou désire.
Mettez-vous donc avec confiance sous le manteau qu’elle ouvre de ses deux bras maternels pour accueillir tous ses enfants ; que tous les fils de Bretagne se retrouvent unis sous son patronage ; qu’ils lui fassent une cour et une garde d’honneur et se montrent partout et toujours de dignes fils d’une telle Mère.
Les exemples ne manquent pas, dans votre histoire, d’extraordinaire et très féconde dévotion à Marie. Nous n’en citerons qu’un seul. le plus remarquable sans doute, celui de Saint Louis-Marie Grignion de Montfort, que Nous avons eu le bonheur d’élever aux honneurs suprêmes de l’Église le 20 juillet 1947.
Recevant le lendemain les nombreux pèlerins bretons, vendéens et poitevins venus à Rome en cette occasion, Nous déclarions : « Tous les saints, assurément, ont été grands serviteurs de Marie, et tous lui ont conduit les âmes ; il (saint Louis-Marie) est incontestablement un de ceux qui ont travaillé le plus ardemment et le plus efficacement à la faire aimer et servir ».
Aujourd’hui, Nous adressant à tous ceux qui entendent faire de leur consécration au Cœur Immaculé de Marie un acte important et définitif, Nous leur disons : à l’imitation de saint Louis-Marie Grignion de Montfort et de tous les saints bretons, faites aimer et servir Marie.
Cela suppose avant tout que vous pratiquerez vous-mêmes les vertus de Marie : la délicatesse de son Cœur Immaculé ; le recueillement et l’esprit de prière, dont parle l’Évangile, quand il rappelle par deux fois (Lc 2, 19 ; 2, 51) qu’elle conservait dans son cœur le souvenir des grâces de Dieu et des actions de l’Enfant Jésus ; l’amour de Dieu, humble, ardent et joyeux, qui éclate dans le Magnificat; l’amour des autres également, de tous les autres, de ses parents, de ses amis, de tous les hommes, cette charité incomparable qui la fait voler au service de sa cousine Élisabeth, dès qu’elle apprend sa prochaine maternité, qui la rend attentive à la gêne des époux, quand le vin vient à manquer aux noces de Cana, qui l’unit enfin de façon si douloureuse et si profonde aux souffrances de son divin Fils pour le salut du genre humain.
Oui, la Très Sainte Vierge, dont la condition fut si humble, dont l’Évangile ne rapporte que si peu de choses, dont le silence remplit presque toute la vie, la Sainte Vierge a vu Dieu accomplir en elle les plus grandes choses sans perdre cette étonnante modestie qui remplit d’admiration. Et c’est pourquoi elle reste le modèle de tous les chrétiens. Avec le Sauveur lui-même, elle est demeurée cachée à Nazareth, unie à Lui dans la douceur et l’humilité, dans l’accomplissement du devoir quotidien et des travaux domestiques, dans la patience et la prière.
On ne connaît d’elle aucun miracle, aucune action extraordinaire, mais elle a aimé Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit, et de toute sa force. C’est là le premier commandement. Et elle a aimé le prochain comme soi-même. « De plus grand que ceux-là il n’est aucun autre commandement » (Mc 12, 30-31).
Toutefois, les fidèles qui ressentent pour la Très Sainte Vierge une dévotion spéciale, veulent souvent mettre toute leur vie à son service et s’unir à d’autres pour propager son culte. Il existe depuis des siècles dans l’Église des associations placées sous le patronage de Marie, qui ont joué dans la sanctification personnelle de nombreux chrétiens et dans l’exercice du zèle apostolique un rôle providentiel maintes fois loué par Nos Prédécesseurs et par Nous-même.
Nous voulons parler, entre autres, de ces congrégations mariales, que Nous avons appelées l’Action catholique dans l’esprit de la Très Sainte Vierge, et dont la Constitution apostolique Bis saeculari du 27 septembre 1948 a défini la nature et l’esprit.
Nous avons appris avec joie qu’elles ont de fervent promoteurs en Bretagne, et Nous souhaitons qu’elles trouvent dans ce pays de la Vierge un terrain fécond, d’où sortiront des légions d’âmes ferventes et apostoliques. Ce qu’elles accomplissent dans les nations les plus diverses et les plus éloignées, de la chrétienté, pourquoi ne le feraient-elles pas dans cette chère Bretagne, dont la foi ancestrale connut de si brillantes époques, de si ardents renouveaux ?
Vous seriez étonnés, chers fils et filles de Bretagne, si aujourd’hui, en cette fête de Sainte Anne, et ici, à Auray, où elle est vénérée d’une manière si émouvante, Nous n’avions un souvenir pour celle que vous appelez à si juste titre la Bonne Mère. Aimez-la bien, cette bonne sainte Anne. Continuez à placer vos foyers sous sa protection. En mettant Marie au monde, elle a donné à l’humanité la plus merveilleuse des créatures, la plus sainte des femmes, le chef d’œuvre de Dieu. N’est-ce pas assez pour que vous l’aimiez et l’honoriez d’une manière unique ?
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Implorant donc l’intercession de Sainte Anne et de la Très Sainte Vierge, Nous appelons sur vous tous, sur vos foyers, vos écoles, vos paroisses, vos diocèses, sur toute la Bretagne, l’effusion la plus abondante des grâces de Dieu, et du fond du cœur Nous vous en accordons pour gage Notre paternelle Bénédiction apostolique.
Revo mélet Kalon Glan Mari ! (Loué soit le Cœur Immaculé de Marie.)
Revo mélet Santez Anna Patronez vad er Vretoned ! (Loué soit Sainte Anne, Patronne des Bretons.)