L’adoration pour le règne du Sacré Cœur ainsi que sa réparation à cause de nos péchés, nos blasphèmes, nos sacrilèges était très marqué dans le XVIII et XIXe siècle, nous pouvons dire qu’aujourd’hui, toutes ces belles oeuvres sont oubliées…
« Les ravages du mal dans tout l’univers, les douleurs dont le Cœur de Jésus est abreuvé, démontrant la nécessité de réparer ces outrages, d’opposer une digue au torrent de l’impiété… »
Le vénérable Père Muard et les Bénédictins du Sacré Cœur 1809-1854
Le vénérable Père Muard a fondé la Société des Pères de Pontivy et les Bénédictins du Sacré Cœur de la Pierre-qui-Vire. Il regardait le Sacré Cœur comme l’arche sainte de sa communauté. En chaire, au confessionnal, dans ses conversations et ses lettres, il recommandait avec instance la dévotion au Sacré Cœur. « Je ressens une affection particulière, disait-il, pour les âmes dévouées au Sacré Cœur de Jésus ». Le Sacré Cœur devait être le sujet le plus habituel des prédications de ses missionnaires. « Quand vous irez au peuple, leur disait-il, vous prêcherez, vous prêcherez encore le Sacré Cœur ».
Les Jésuites – Le Père Ramière et l’Apostolat de la Prière 1821-1884
Le Père Ramière fut, comme le disait le Père Regnault en annonçant sa mort, « l’apôtre passionné du Sacré Cœur ». Aimer le Sacré Cœur, le faire aimer, populariser par tous les moyens en son pouvoir la dévotion à ce divin Cœur, telle fut la vie du Père Ramière. Le Père Gautrelet avait tenté de fonder l’Association de « l’Apostolat de la Prière ».
Il invita le Père Ramière à développer son œuvre. Pour répondre à cet appel, celui-ci composa son beau livre « l’Apostolat de la Prière ». Il voua toute l’œuvre au Sacré Cœur. Les associés promettent leur dévouement au Cœur de Jésus. Ils ont la mission de propager la dévotion au Sacré Cœur. C’est une ligue sainte, une ligue de zèle et de prières en union avec le Cœur de Jésus. Les associés consacrent chaque matin leur journée au Cœur de Jésus. « Ils offrent les prières, les œuvres et les souffrances de la journée aux intentions pour lesquelles Notre Seigneur s’offre lui-même sur l’autel, et particulièrement aux intentions recommandées par le Souverain Pontifie pour le mois présent ».
Il y en a qui offrent chaque semaine ou chaque mois une communion réparatrice pour consoler le Cœur de Jésus et détourner les fléaux de la justice divine. Cette armée sainte compte vingt millions de fidèles et soixante mille paroisses ou communautés. Elle a pour organe le « Messager du Cœur de Jésus ».
Le Père Lyonnard et l’Apostolat de la Souffrance 1819-1886
Le Père Lyonnard, qui fit son noviciat avec le Père Ramière, fut de son côté, sous une autre forme, un apôtre du Sacré Cœur. Dès le commencement de sa vie religieuse, par l’amour pour le divin Cœur, il s’offrit pour être victime. « Ô Marie, dit-il, obtenez-moi la faveur de marcher toute la vie par le chemin des peines intérieures. Ô Jésus, mon cher Maître, chargez-vous envers moi de l’office de sacrificateur comme votre Père céleste l’a exercé envers vous. Le Cœur surtout est à immoler par les angoisses, les ennuis, les tribulations, les agonies, comme fut immolé le Cœur de mon Sauveur Jésus ».
Notre Seigneur accepta cette généreuse offrande de son serviteur pour la réparation des iniquités du monde et le salut des âmes. Pendant quarante quatre ans les peines intérieures furent le pain quotidien du Père Lyonnard. Il y eût succombé si le Sauveur « n’eût pas répandu dans son Cœur des flots d’amour », selon ses propres paroles.
Il engageait les âmes à marcher comme lui dans la voie de l’immolation, soit qu’elle fût spontanément acceptée, soit qu’elle fût généreusement sollicitée ; c’est le but de nombreuses feuilles libéralement répandues et du beau livre de « L’Apostolat de la Souffrance », qui a suscité tant d’héroïsme pour les intérêts du Cœur de Jésus.
Le Révérend Père fonda l’œuvre si touchante du salut des mourants par le Cœur agonisant de Jésus. Pie IX l’approuva bientôt. Il composa la prière que tant de pieuses âmes ont depuis récitée en faveur des quatre-vingt mille mourants de chaque jour, et qui d’après une révélation, a sauvé une multitude de pécheurs. Rappelons cette prière :
« Ô très miséricordieux Jésus, qui brûlez d’un amour si ardent pour les âmes, je vous en conjure par l’agonie de votre très Saint Cœur, et par les douleurs de votre Mère immaculée, purifiez dans votre sang tous les pécheurs de la terre qui sont à l’agonie et qui aujourd’hui même doivent mourir. Cœur agonisant de Jésus, ayez pitié des mourants. Ainsi soit-il ! ».
Le Père Drevon et la communion réparatrice 1820-1880
Le Père Drevon a beaucoup travaillé en France pour le règne du Sacré Cœur, mais l’objet principal de son apostolat fut l’œuvre de la communion réparatrice. Par cette association, une section de sept personnes par semaine ou de trente par mois assure au moins une communion réparatrice chaque jour.
Ces communions ont pour but de répondre aux demandes de Notre Seigneur à Marguerite-Marie : « Du moins, lui disait-il, donne-moi cette consolation de suppléer à l’ingratitude des hommes en me recevant dans l’Eucharistie autant que l’obéissance te le permettra », et encore : « Je viens dans le Cœur que je t’ai donné, afin que, par ton ardeur, tu répares les injures que j’ai reçues des Cœurs tièdes et lâches qui me déshonorent dans le saint sacrement ».
Le Père Drevon se livra tout entier à l’apostolat de la communion réparatrice, et c’est par millions qu’il faut compter les réparations de ce genre dont son zèle a été le principe. Après les Souverains Pontifes, Pie IX et Léon XIII, tous les évêques ont loué et recommandé cette œuvre. Marseille seule compte 13.000 associés dont les noms sont écrits dans un grand cœur déposé à Paray. Ce groupe offre au Cœur de Jésus 330.000 communions par an. Dunkerque, Saint-Quentin, Saint-Omer comptent parmi les villes que l’on peut appeler « les cités du Sacré Cœur » (Fastes du Sacré Cœur, par un prêtre de Coutances, p. 350).
Les pères du Sacré Coeur – Le Père Tournély et le Père Varin
En 1794, de jeunes ecclésiastiques du Séminaire Saint-Sulpice, obligés d’émigrer, fondèrent la pieuse société des Pères du Sacré Cœur. Ils prirent pour Supérieur le Père Tournély, qui se sentit pressé de vouer toute la petite société au culte du Sacré Cœur. Il écrivit de son sang cette consécration : « Je me consacre au Cœur de Jésus et à celui de Marie. Je fais en conséquence le vœu d’employer ma vie à propager la dévotion au Sacré Cœur et à l’Immaculée Conception de Marie. Je m’engage à renouveler ce vœu deux fois l’an ».
C’est lui qui prépara la fondation des Dames du Sacré Cœur. Le Père Varin succéda au Père Tournély comme Supérieur de la petite Congrégation des Pères du Sacré Cœur, qui prirent le nom de Pères de la Foi, en attendant la restauration de l’Ordre des Jésuites, où ils furent incorporés.
Sa grande œuvre fut la fondation, en 1800, de la Société des Dames du Sacré Cœur ! « Après Dieu, dira Madame Barat, la Société doit son existence au Père Varin ». Il voulut que le Sacré Cœur fût le pivot de tout dans cette Congrégation, aussi bien pour l’éducation des élèves que pour la vie intérieure. « La première fin de votre institut, disait-il, n’est pas l’éducation proprement dite, c’est la dévotion au Sacré Cœur ».
Les pères des Sacrés Coeurs – Picpus : le Père Coudrin
Cet institut a été fondé au temps de la grande Révolution. Il a de belles missions en Océanie. Le Père Damien, victime de son dévouement aux lépreux, a montré quelle générosité peut inspirer l’amour du Sacré Cœur. Les Pères de Picpus ont eu des martyrs à la Commune, en 1871. Ils font chaque jour une heure d’adoration au Sacré Cœur présent dans le tabernacle. Un autre institut s’est fondé dans le même esprit, c’est celui des Pères des Sacrés Cœurs de Naples.
Les missionnaires du Sacré Coeur – Issoudun : Le Père Chevalier
En 1854, par une intervention admirable de la Providence, fut fondée à Issoudun la Société des Missionnaires du Sacré Cœur ou de Notre Dame du Sacré Cœur. Elle a pour but de faire vivre ses membres de la vie du Sacré Cœur par l’entremise de la Sainte Vierge et de les consacrer à la conquête des âmes, dont a soif le Cœur de Jésus.
L’invocation « Aimé soit partout le Cœur de Jésus » est leur mot d’ordre. Le Révérend Père Chevalier, leur fondateur, a mis tout son dévouement et tout son Cœur à construire à Issoudun une basilique au Sacré Cœur. Dans les autels les vitraux, les peintures, sont représentés les prophètes qui ont annoncé le Sacré Cœur, ses figures et symboles et les saints qui l’ont glorifié.
Le Père Chevalier a aussi écrit un livre considérable sur le Sacré Cœur où il montre bien dans le Sacré Cœur le centre où tout converge dans l’Ancien et le Nouveau Testament, l’âme de l’Église, le salut du monde, le remède à tous nos maux. Avec lui, le Père Jandel a fondé la « Petite œuvre du Sacré Cœur » qui aide ces Pères à entretenir quatre cents élèves dans leurs écoles apostoliques. Ils ont de belles missions en Océanie.
La Bienheureuse Mère Barat (Sophie), fondatrice des Dames du Sacré Cœur 1779-1865
Sophie Barat est née à Joigny en 1779. Elle acheva son éducation à Paris au quartier du Marais auprès de son frère, l’abbé Barat, dans un petit cénacle de personnes pieuses qui se cachaient pendant la Révolution. C’était une âme très cultivée et fortement trempée. Par son frère, elle fut mise en rapports avec le Père Varin, Supérieur des Pères du Sacré Cœur, qui cherchait comme le Père Tournély à fonder une Société de Religieuses enseignantes analogue à l’institut des Jésuites.
On avait essayé avec la princesse Louise de Condé et avec l’archiduchesse Marie-Anne, mais ces nobles chrétiennes n’avaient pas abouti. Le Père Varin crut trouver l’instrument de la Providence dans la sœur de l’abbé Barat ; il réussit. Un premier pensionnat fut fondé à Amiens. Madame Barat rencontra bientôt de vaillantes auxiliaires comme Madame Duchesne et Madame Geoffroy.
L’œuvre se développa, mais elle passa par des épreuves, comme toutes les œuvres nouvelles, notamment de 1839 à 1843. Elle a triomphé de toutes les difficultés. Elle est aujourd’hui (1900) répandue dans les deux mondes. Elle a 6.500 religieuses, 140 maisons, des milliers d’enfants dans ses pensionnats et ses écoles, des centaines de mille d’anciennes élèves.
Le but de Madame Barat fut de servir et faire aimer Dieu, son moyen : la dévotion au Sacré Cœur, son œuvre : l’éducation des jeunes filles. Elle a toujours voulu unir la vie intérieure à l’apostolat. Elle écrivait en 1828 : « Un ordre qui unit la vie contemplative à la vie active possède une existence de grâce qui soutient admirablement l’action… c’est ce que je me sens poussée d’établir dans notre société ».
Sa vie a été écrite par la Mère Cahier, par Monseigneur Baunard, par Monsieur Geoffroy de Grandmaison. Ses religieuses ont les trois vœux ordinaires, auxquels elles ajoutent celui de se dévouer à l’éducation de la jeunesse. Elles donnent une bonne part à la piété : une heure d’oraison le matin, une demi-heure le soir ; chaque jour une lecture spirituelle et deux examens de conscience.
Chez elles, la dévotion au Sacré Cœur est « le pivot sur lequel tout se meut, le terme auquel tout aboutit ». La bienheureuse avait l’esprit de réparation. Elle parlait souvent « des ravages du mal dans tout l’univers, des douleurs dont le Cœur de Jésus était abreuvé, démontrant la nécessité de réparer ces outrages, d’opposer une digue au torrent de l’impiété… ».
Elle redoutait une trop grande activité extérieure : « On doit partout porter le recueillement, disait-elle, au moins par une tendance de Cœur qui ne coûte aucun effort. C’est le tournesol, qui suit naturellement le mouvement de l’astre qui l’attire, l’éclaire et le vivifie ».
Elle avait composé une courte oraison, qu’elle répétait à satiété, comme le résumé de sa pensée : « Cœur Sacré de Jésus, ô ma lumière, mon amour et ma vie, faites que je ne connaisse que vous, que je n’aime que vous, que je ne vive que de vous, en vous et par vous ».
Elle alla au ciel en la fête de l’Ascension, en 1865.
Les Servantes du Cœur de Jésus, de Saint-Quentin
C’est en 1867 que cet institut fut fondé à Strasbourg par la Sœur Marie du Sacré Cœur, née Oliva Uhlrich. Le but de ces Sœurs est de réaliser en elles l’immolation complète par amour et d’offrir leur vie pour la réparation et pour le règne du Sacré Cœur.
Déjà plus d’une centaine de ces pieuses victimes ont été agréées par le Sacré Cœur et sont mortes saintement, souvent dans la fleur de la jeunesse. L’œuvre a passé par des épreuves providentielles, mais elle en est sortie plus vivante. La maison-mère était à Saint-Quentin avant la guerre ; il y a plusieurs maisons en Alsace-Lorraine, une en Hollande, une en Belgique.
Elles ont quelques œuvres de charité, mais leur but principal est la vie d’adoration réparatrice et de supplication au Cœur de Jésus dans l’Eucharistie pour les besoins de l’Église et le salut des âmes. La vie de la Sœur Marie de Jésus, publiée chez Desclée, fera bien connaître cet institut.
Sœur Marie Véronique et les Sœurs Victimes du Sacré Cœur de Jésus de Grenoble 1825-1883
C’est en 1867 que Catherine Lioger fonda son œuvre à Gênas près de Grenoble et prit le nom de Sœur Véronique du Cœur de Jésus.
« Victime du Cœur de Jésus ! C’est bien le caractère particulier de cette grande âme, dit Monseigneur l’évêque de Namur, c’est le cachet spécial de sa sainteté ; c’est ce qui fait l’éclatante beauté d’une vie où resplendissent toutes les vertus ».
« Cette vénérable Fondatrice, dit Monseigneur l’évêque d’Évreux, connut toute la profondeur des humiliations, toutes les amertumes de la douleur, toutes les rigueurs des infirmités et des souffrances. Parce qu’elle voulut vivre en victime et qu’elle a aimé les ignominies de la croix en union avec le Sacré Cœur délaissé, sa vie fut une longue agonie, une longue humiliation ».
L’institut a été approuvé par le Saint-Siège en 1908. La vie des Sœurs victimes du Sacré Cœur de Jésus est contemplative. Elles gardent la clôture et récitent l’office canonial. « Les Sœurs de l’Institut se consacrent à l’expiation ; elles offrent à Dieu leurs prières, leurs actions et leurs vies même, pour la réparation des offenses faites à Dieu, l’exaltation de la sainte Église, la conversion des pécheurs, la sanctification croissante des âmes justes et particulièrement des âmes consacrées et l’accomplissement de tous les desseins du Sacré Cœur de Jésus ».
La maison-mère a dû se transporter de Villeneuve-Lès-Avignon, à Namur, l’année fatale des expulsions. Lire la Vie de la Mère Véronique, par le Père André Prévot, chez Vic et Amat (Lyon et Paris).
Sœur Marie de Jésus, Marie Deluil-Martiny, fondatrice des Filles du Cœur de Jésus 1844-1884
Ce fut comme zélatrice de la garde d’honneur que Marie Deluil-Martiny commença son apostolat du Sacré Cœur. Le Père Calage, son pieux directeur, lui avait prédit qu’elle serait appelée à une plus haute mission. « Vous serez victime, lui disait-il, vous serez sacrifiée et immolée, tenez-vous prête ».
Elle se sentait destinée à une œuvre où l’on s’immolerait spécialement en réparation des outrages eucharistiques. Son directeur approuvait ses desseins. « J’emporte votre âme, lui disait-il, et je l’offrirai à Dieu. Mon intention formelle est que vous vous donniez au Cœur de Jésus irrévocablement en qualité de victime. Je vous offrirai à la messe, Notre Seigneur fera le reste ».
En 1873, elle commença l’œuvre désirée et prédite, la Congrégation des Filles du Cœur de Jésus. S’offrir en victime, c’est le but de son institut. Voici comment elle le résume : « Offrir sans cesse à Dieu, par les mains de Marie qui a été prêtre et victime avec Notre Seigneur, l’hostie sainte qui s’immole d’autel en autel et d’heure en heure par les mains de tous les prêtres ; l’adorer sans interruption perpétuellement sur son trône : s’offrir soi-même avec elle, victime volontaire, en se remettant corps et âme à la disposition de Notre Seigneur, afin de lui procurer le moyen de souffrir réellement en ses membres mystiques et d’achever ainsi ce qu’il lui plaît encore d’ajouter à sa passion, et cela en expiation des sacrilèges eucharistiques et pour les intérêts généraux de l’Église et notamment du sacerdoce ».
C’est à Anvers que l’œuvre prit naissance. En 1880, elle ouvrit un second monastère dans la maison de famille de la Sœur Marie de Jésus, et c’est là que la fondatrice périt frappée par un anarchiste, le 27 février 1884, comme le Père Calage l’avait entrevu prophétiquement.
La Mère Marie de Jésus, fondatrice de la Congrégation de Marie Réparatrice 1818-1878
Cette congrégation est aussi une œuvre réparatrice. Les Sœurs de cet institut joignent à leurs œuvres l’adoration réparatrice au saint sacrement. Elles s’inspirent de la dévotion au Sacré Cœur. Elles ont été fondées par Émilie d’Oultremont, baronne de Hooghworst [bienheureuse]. Elle était mariée et vivait pieusement à Rome. Notre Seigneur se manifesta à elle en 1843.
« Mon Maître bien-aimé m’apparut, dit-elle, avec une physionomie de tendresse indicible, en me montrant son Cœur. Il me semblait profondément triste, et il vint à moi avec deux couronnes en mains, l’une de roses, l’autre d’épines. Même avant d’entendre une parole de la bouche divine, je saisis la couronne d’épines, avec tout l’amour de mon Cœur, et depuis la couronne d’épines me fut bien chère ».
Cette pieuse âme commença une vie de réparation. Son mari mourut pieusement. Le 8 décembre 1854, jour où fut proclamé le dogme de l’Immaculée Conception, comme elle était en adoration, il lui sembla voir Marie et l’entendre lui dire que son Cœur de mère souffrait de n’être plus sur la terre « pour entourer et faire entourer l’autel d’adoration, de respect, de tendresse et d’amour, et guérir les blessures faites à Jésus du tabernacle », et qu’elle désirait que des âmes dévouées voulussent bien tenir sa place.
L’œuvre réparatrice par Marie fut bientôt fondée. Elle a pris une extension rapide. La Congrégation compte plus de vingt maisons, à Paris, Londres, Rome, Liège, Séville, Jérusalem, etc. Ces Sœurs offrent toutes leurs œuvres à Marie pour qu’elle les purifie et les offre à Jésus, afin de disposer son Cœur à la miséricorde.
Sœur Marie-Thérèse Dubouchet, fondatrice de la Congrégation de l’Adoration réparatrice
Les religieuses de l’Adoration réparatrice sont aussi toutes dévouées au Sacré Cœur. Elles ne se contentent pas de vivre du saint sacrement et auprès du saint sacrement, et de déposer entre les mains de Marie leurs adorations et leurs hommages eucharistiques, trois fois par jour elles célèbrent les bontés et les merveilles du Cœur même de Jésus, priant Marie de faire agréer leurs louanges et leurs réparations à son divin Fils, et chacune d’elles aime à se dire, comme leur sainte fondatrice, « une enfant du Sacré Cœur pour l’éternité ».
Le berceau de l’œuvre fut la chapelle des Carmélites, rue Saint Jacques, à Paris. L’exemple des Sœurs de l’Adoration réparatrice donna à quelques pieux fidèles la pensée de fonder l’Association de l’Adoration nocturne.
La Visitation de Bourg et l’œuvre de la Garde d’honneur
C’est en 1863 que l’œuvre de la garde d’honneur commença à Bourg. Elle a pour but de consoler Notre Seigneur de l’ingratitude des hommes, par l’offrande d’une heure de prière ou de travail sanctifié chaque jour. Marie Deluil-Martiny, de Marseille, fut une des principales zélatrices.
En deux ans quatre vingt mille associées se firent inscrire. Le pape et les évêques voulurent en être. Pie IX connaissait la pieuse zélatrice de Marseille. « Oh ! Je la bénis de tout Cœur », disait-il un jour. Il revendiquait, comme le fit ensuite Léon XIII, le titre de « Premier garde d’honneur du Sacré Cœur ». Un pieux sanctuaire s’élève à Bourg pour centraliser la garde d’honneur.
La Mère Saint Jérôme, du Couvent des Oiseaux, et le Mois du Sacré Cœur 1810-1868
La Mère Saint Jérôme avait pour directeur le Père Ronsin qui lui inspira la dévotion au Sacré Cœur. C’est elle qui rendit populaire le mois du Sacré Cœur. Elle contribua beaucoup à en faire adopter la pratique publique par Monseigneur de Quelen, archevêque de Paris.
Elle composa son Mois du Sacré Cœur, qui fut longtemps le seul, et qui est écrit avec autant d’onction que de doctrine. Elle joignit bientôt à cet ouvrage La Pratique de l’amour envers le Sacré Cœur de Jésus, et plus tard les Trente-trois considérations sur le Sacré Cœur de Jésus, vrais trésors spirituels.
Elle inspirait à ses élèves le zèle de cette dévotion, et par sa correspondance elle exerçait un apostolat incessant. « Demandez tous les jours la dévotion au Sacré Cœur, disait-elle, c’est le moyen le plus doux et le plus efficace pour avancer dans la religion. C’est le commencement, le milieu et la fin, pour les parfaits comme pour les imparfaits ».
Elle faisait sa demeure dans le Cœur de Jésus. La consécration de la France au Sacré Cœur la préoccupait constamment. « Le vœu de Louis XVI s’accomplira, disait-elle, ce doit être l’objet de nos prières et de notre zèle ». Elle croyait d’ailleurs au règne général du Cœur de Jésus et à son triomphe.
La Mère Marie de Jésus du Couvent des Oiseaux et les promesses renouvelées
C’était le 21 juin 1823, à la fête de saint Louis de Gonzague. Notre Seigneur renouvela les promesses qu’il a faites à Marguerite-Marie. Il dit à la Sœur Marie de Jésus : « La France est toujours bien chère à mon Cœur et elle lui sera consacrée. Je prépare à la France un déluge des grâces lorsqu’elle sera consacrée à mon divin Cœur. Je prépare toutes choses : la France sera consacrée à mon Divin Cœur et toute la terre se ressentira des bénédictions que je répandrai sur elle. La foi et la religion refleuriront en France par la dévotion à mon divin Cœur ». (« Messager du Cœur de Jésus », janvier 1871).
Sœur Marie de Saint Pierre et la Sainte Face
La Sœur Marie de Saint Pierre, du Carmel de Tours, a fondé avec Monsieur Dupont l’œuvre de la Sainte Face, mais son but intime était bien la réparation au Sacré Cœur. Sa demeure spirituelle était le Sacré Cœur de Jésus : c’est dans cette fournaise ardente qu’elle a puisé tant de lumières pour elle-même et pour les autres.
Jésus lui communiqua souvent les plus intimes secrets de son Cœur adorable. Dès l’année 1843, Notre Seigneur lui accorda des faveurs extraordinaires et lui annonça que sa justice était irritée à cause des péchés des hommes. C’est la même année que Notre Seigneur s’adressa à la fondatrice de la Congrégation de Marie Réparatrice.
C’est en 1846 que la Sainte Vierge apparut à La Salette. Pressée par la grâce, Sœur Saint-Pierre s’offrit à Notre Seigneur en victime. Il lui inspira l’établissement d’une association réparatrice.
Elle vit dans le Sacré Cœur de Jésus le désir qu’il a de faire miséricorde, n’y mettant pour condition que la réparation des outrages faits à son divin Père. Elle reçut de vives lumières sur la Face adorable de Notre Seigneur qui devait être l’objet sensible de la réparation.
Un jour à la sainte messe, Notre Seigneur lui donna l’ordre de dire et faire dire le plus souvent possible l’invocation suivante : « Qu’à jamais soit loué, béni, aimé, adoré, glorifié, le très saint, très sacré, très adorable, inconnu, inexprimable Nom de Dieu, au ciel, sur la terre, dans les enfers, par toutes les créatures sorties des mains de Dieu et par le Sacré Cœur de Jésus au très saint sacrement de l’autel ».
Victimes du Sacré Cœur de Marseille. Le Père Jean et Mademoiselle de Gérin 1813-1882
Monsieur d’Arbaumont, en religion le Père Jean du Sacré Cœur, fut appelé par Monseigneur l’évêque de Marseille, « le trésor de son diocèse », et par le peuple, « son paratonnerre ».
Cette grande âme s’était vouée en victime pour la gloire du Sacré Cœur. Il sut en 1840 qu’un institut de Sœurs Victimes du Sacré Cœur avait été fondé à Marseille par Mademoiselle de Gérin. Il voulut s’y unir en devenant leur aumônier et en fondant une Association de Victimes.
Cela ne lui suffit pas et bientôt, il commença avec quelques prêtres dévoués un institut de Prêtres victimes. « Toujours souffrir, toujours aimer », c’était sa devise. Il s’appliqua à faire souffrir à son corps sans relâche, tout ce que l’imagination la plus féconde peut inventer.
« Il faudrait, disait-il, que les rapports avec le bon Jésus prissent de plus en plus un caractère de compassion, de douleur, de sainte tristesse ; que les âmes fussent sans cesse avec lui au jardin des Olives et sur la croix ».
Il passa aussi par de grandes épreuves. Une terrible maladie compléta son martyre et il rendit son âme à Dieu, un vendredi, jour consacré au Sacré Cœur. Ses compagnons étaient morts avant lui. Son œuvre de prêtres n’eut pas de suite, mais les Sœurs Victimes continuent leur œuvre.
Jean-Joseph Allemand et les Prêtres du Sacré Cœur de Marseille
Monsieur Allemand fut un grand ami du Sacré Cœur et un apôtre de la jeunesse. Ce digne prêtre du diocèse de Marseille consacra toute sa vie à l’Œuvre dite de Jeunesse. Aucune difficulté ne le rebuta. La source de son courage se trouvait dans la tendre dévotion qu’il professa toujours pour le Sacré Cœur de Jésus.
C’est au Sacré Cœur qu’il rapportait tout le succès de son œuvre. « On loue notre œuvre de jeunesse, disait-il, mais à Dieu ne plaise que nous cherchions à nous en glorifier. Toutes les grâces que Dieu verse sur nous, c’est au Sacré Cœur que nous les devons ».
Il ajoutait : « Nous avons été fondés par le Sacré Cœur ». Il récitait chaque jour le petit office du Sacré Cœur. Il aimait cette oraison jaculatoire : « Cœur Sacré de Jésus, ayez pitié de nous », et il avait habitué ses jeunes gens à s’en servir pour se saluer mutuellement. Il ne parlait du Sacré Cœur de Jésus qu’avec des transports d’amour.
Un dimanche, à la bénédiction du saint sacrement, en lisant l’oraison du Sacré Cœur où l’on déplore les injures faites à ce divin Cœur par des hommes ingrats, il fondit en larmes et ne put continuer. Ses dernières paroles furent un acte de confiance au Sacré Cœur. Il laissa pour continuer son œuvre une Société de Prêtres du Sacré Cœur.
Sœur Marie-Antoinette Apparition du 3 mai 1910 à la Visitation de Paris, rue Denfert-Rochereau
La Sœur Marie-Antoinette, âgée de 35 ans, souffrait d’une énorme tumeur du foie. Le 3 mai 1910, à 3 heures du matin, la Sœur qui la gardait la vit se soulever subitement sur son lit et rester immobile dans l’extase. Après quelques minutes la malade, revenue à elle, lui dit :
– Vous n’avez donc pas vu ?
Et sur sa réponse négative :
– Mais Notre Seigneur était là, et ma Sœur Millon (morte il y avait trois mois) y était aussi !
Puis, fondant en larmes :
– Ils sont partis et ils ne m’ont pas emmenée.
Elle était guérie. Voici ce qu’elle raconte : Elle vit Notre Seigneur se présenter à elle, couronné d’épines, triste et majestueux, mais la bonté dominait tout. Il lui dit un mot pour elle seule. Puis toute sa vie lui apparut en un instant, comme au moment du jugement sans doute.
Elle vit clairement ses fautes passées et ce qu’elle devait faire à l’avenir. Et Notre Seigneur ajouta :
– « Surtout, aime-moi, j’ai tant besoin d’amour ! J’en trouve si peu, même auprès des cœurs qui me sont consacrés. Je suis l’Époux fidèle, en moi il n’y a pas de déception ».
Puis Notre Seigneur étendant la main lui découvrit son Cœur tout brûlant de flammes. Un rayon s’en détacha et vint la guérir. La Sœur Millon la bénit et lui dit :
– « Maintenant, il ne faut plus être à Dieu à moitié… ».
Appel à la réparation : Léon XIII et Monseigneur Gay
Léon XIII, dans une audience à quelques personnages qui lui exprimaient leurs souhaits à la fin de l’année 1889, leur exprima la crainte d’un grand châtiment dont la société serait menacée.
« Notre Seigneur disait-il, viendra, non plus avec un visage doux et paisible, mais avec un visage irrité, pour frapper et pour purifier son Église. Car, ajoutait-il, il y a beaucoup de lâches même parmi les justes, et parmi ceux qui devraient être les meilleurs, il y a des membres pourris ».
Le Saint Père reconnaît qu’on prie et que beaucoup prient : « Mais cela ne suffit pas, disait-il, pour apaiser Dieu, et cela pour des raisons cachées dans son Cœur Sacré ». (Cité par « L’Univers »).
Monseigneur Gay écrit dans une lettre au Père Deschamps, du 3 septembre 1883 (Alliance, préface) :
« Que votre règne arrive !… ».
Nous en sommes aux extrémités. « La vie et la mort sont devant nous ». Il faut se convertir ou périr. Le mal nous presse de toutes parts, mais « la charité de Jésus nous presse » bien plus encore.
Il est temps de secouer le sommeil et de vaquer aux œuvres divines. Il est temps de briser avec l’esprit du monde et présentant à Dieu « de dignes fruits de pénitence » de se retremper aux sources évangéliques « pour cheminer ostensiblement comme des fils de lumière ».
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Il est temps que « le jugement commence » si nous voulons éviter d’être terriblement jugés, et comme saint Pierre le demande, « il faut que ce jugement commence par la maison de Dieu », « cette maison qui est nous-mêmes », dit saint Paul, nous évêques, nous prêtres, nous religieux et religieuses, nous consacrés, nous baptisés.
Source : Etudes sur le Sacré Coeur de Jésus par le Bienheureux Léon Déhon – 1923