C’est quoi le Talmud ?
Le TALMUD tire son nom du mot Lamud – ‘il a enseigné’, et signifie « L’Enseignement ». Par métonymie, ce nom s’applique au livre qui contient l’Enseignement, qui est appelé lui-même Talmud. C’est l’ouvrage doctrinal qui, seul, expose de manière exhaustive et explicite les connaissances et les enseignements (indispensables) au peuple juif.
D’où vient le Talmud ?
Quant à son origine, les Rabbins considèrent que Moïse en est le premier auteur. Ils affirment qu’à côté de la loi écrite reçue par Moïse de Dieu lui-même sur le Mont Sinaï, sur des tables de pierres, appelées Torah Schebiktab, Moïse aurait reçu également des interprétations de cette loi divine, ou ‘loi orale’, appelée en hébreu Torah Shebeal Peh.
Les juifs disent que c’est la raison pour laquelle Moïse est resté si longtemps sur la montagne. En effet, Dieu (pas bête !) aurait eu suffisamment d’un jour pour lui refiler les tablettes !
Moïse aurait transmis cette loi (divine) orale à Josué ; Josué l’aurait enseignée à son tour aux soixante-dix Sages ; les soixante-dix Sages l’auraient transmise aux Prophètes, et les Prophètes à la Grande Synagogue. On tient pour assuré (chez les juifs) qu’elle aurait été transmise successivement par certains rabbins au cours des générations, jusqu’à ce qu’il devînt impossible de la retenir oralement dans son entièreté.
Les prémisses du Talmud juif écrit
Quoi qu’il en soit de cette histoire des rabbins, il est bien connu qu’en Palestine existaient, avant la naissance du Christ, des écoles dans lesquelles la littérature sacrée était enseignée. Les commentaires des Docteurs de la Loi étaient notés sur des parchemins, des sommaires étaient rédigés, en guise d’aide-mémoire, et ces listes et premiers commentaires, une fois colligés, formèrent les prémisses du Talmud juif.
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Au second siècle après JC, le Rabbin Jehuda, lequel, en raison de la sainteté de sa vie, fut appelé Le Saint ou le Prince, réalisant que la qualité de l’enseignement doctrinal des juifs baissait, que leur loi orale se perdait, et que le peuple juif était en train d’être dispersé, fut le premier à envisager des moyens et des méthodes permettant de restaurer et de préserver leur loi orale. Il collecta toutes les listes aide-mémoire et tous les manuscrits et il en fit un livre qui fut appelé le Sepher Mischnaioth, Mischnaioth étant le pluriel du mot ‘Mischnah’, qui signifie ‘seconde’, c’est-à-dire « seconde loi ».
En grec, ce terme se traduit par Deuterosis, d’où le Deutéronome. Il divisa ce livre en six parties, et chaque partie fut divisée en un grand nombre de chapitres. Nous les examinerons plus tard.
La Mischnah représente le fondement et la principale partie de l’ensemble du Talmud. Ce livre a été accepté par les juifs partout, et ils y virent leur authentique code juridique. Il fut enseigné et glosé dans leurs académies en Babylonie (Irak actuel, lieu d’exil des juifs) à Sura, à Iumbaditha et à Nehardea, ainsi que dans leurs académies en Palestine à Tibériade, à Iamnia et à Lydda.
Comme les interprétations se multipliaient avec le passage des siècles, les disputations et les arrêts des docteurs de la loi concernant la Mischnah furent colligés, et ces écrits constituèrent un supplément au Talmud, appelé la Guemarah.
Ces deux parties (lois recensées + commentaires) sont si mêlées dans le corps du Talmud que la Mischnah est utilisé en premier, un peu à la manière d’un manuel juridique, puis on a recours à la Guemarah, qui fournit une analyse de différents avis sur une cause donnée, qui permettent d’aboutir à une décision arrêtée (c’est une sorte de jurisprudence, ndlr).
Tous les préceptes de la Mischnah, toutefois, n’étaient pas pris en compte dans les discussions des différentes écoles judaïques. Ceux qui étaient tombés en désuétude en raison de la destruction du Temple, et ceux dont l’observance n’était possible qu’en Terre Sainte n’étaient généralement plus commentés. Leur explication était laissée à la venue d’Elias et au retour du Messie. C’est pourquoi certaines parties de la Mischnah n’ont pas de correspondant dans la
Guemarah.
En interprétation la Mischnah du Rabbi Jehuda, les écoles (juridicoreligieuses) de Palestine et de Babylonie suivirent chacune leur propre méthode, et c’est ainsi qu’elles contribuèrent à écrire au cours des siècles une Guemarah double (en deux versions) : la version de Jérusalem et la version de Babylone.
L’auteur de la version de Jérusalem était le Rabbin Jochanan, qui dirigea la synagogue de Jérusalem durant quatre-vingts ans. Il écrivit 39 chapitres de commentaires sur la Mischnah, qu’il termina de mettre au point en l’an 230 après JC.
La Guemarah de Babylone, en revanche, n’a jamais été compilée par qui que ce soit. Le Rabbin Aschi commença a y travailler en 327, et il y contribua pendant soixante ans. Il fut suivi par le Rabbin Maremar, aux environs de 427. Elle fut complétée par le Rabbin Abina aux environs de l’an 500. La Ghemarah de Babylone comporte trente-six chapitres d’interprétations. Cette double Guemarah, s’ajoutant à la Mischnah, compose ainsi un double Talmud : la version de Jérusalem est peu utilisée, en raison de sa brièveté et de son obscurité ; c’est la version babylonienne qui est tenue en très haute estime par les juifs, de tout temps. La Guémarah est suivie d’addenda appelés Tosephoths. C’est ce terme qui est utilisé pour désigné les avis du Rabbi Chaia sur la Mischnah. Les avis formulés par des docteurs extérieurs aux grandes écoles rabbiniques furent appelés Baraietoth, ou « opinions extérieures ».
Ces Commentaires furent eux-mêmes complétés par des décisions appelées Piske Tosephoth (courtes thèses et simples principes). Durant environ cinq siècles après la rédaction du Talmud de Babylone, l’étude de la littérature fut randement remise en cause en partie en raison des calamités publiques et en partie en raison de dissensions entre les juristes Mais au onzième siècle, d’autres auteurs écrivirent de nouveaux suppléments au Talmud. Parmi ceux-ci, nous mentionnerons en raison de leur importance, les Tosephoth du Rabbi Ascher. Parallèlement apparurent le Perush du Rabbin Moische ben Maimon, appelés par les juifs Rambam (c’est une abréviation de son nom), par les chrétiens Maïmonide et par le Rabbi Schelomo, Iarchi ou Raschi. Ainsi, la Mischna, la Guemara, les Tosephoth, les notes en marge du Rabbi Ascher, les Piske Tosephoth et le Perusch (ce mot hébreu signifie ‘livre’) Hamischnaioth de Maimonide, réunis en un seul volume, constituent une vaste œuvre appelée le Talmud.
Les six principales parties du Talmud mentionnées plus haut
I. ZERAIM : concerne les graines. Il traite de semences, de fruits, d’herbes, d’arbres ; de l’usage public et domestique des fruits, des différentes graines (semences), en bref, d’horticulture.
II. MOED : concerne les fêtes, le moment où le Sabbath et les autres fêtes doivent commencer, doivent prendre fin et être célébrées.
III. NASCHIM : concerne les femmes. Cette partie traite du mariage, de la répudiation, des devoirs des femmes, des maladies féminines, des relations conjugales.
IV. NEZIKIN : c’est un traité de droit, concernant les dommages. Il traite des dommages subis par les hommes et les animaux, des pénalités et des dédommagements.
V. KODASCHIM : concerne le sacré. Traite des sacrifices et des divers rites sacrificiels.
VI. TOHOROTH : concerne la purification ; traite de la souillure et de la purification des vases et vaisselles, des draps et autres objets.
Chacune de ces six parties, que les juifs appellent les Schishah Sedarim ce qui signifie « six ordres » ou « six ordonnancements » est divisée en livres, appelés Massiktoth, ces livres se divisant eux-mêmes en chapitres, ou Perakim.
Le Talmud dans le monde Chrétien
Ce que les Chrétiens ont pu penser du Talmud est amplement démontré par de nombreux édits et décrets publiés à on sujet, par lesquels les magistrats suprêmes de l’Eglise et de l’Etat le proscrivirent à de nombreuses reprises, condamnant ce Second Traité de la Loi juive aux flammes.
En 553, l’Empereur Justinien interdit la diffusion des livres du Talmud dans l’ensemble de l’Empire Romain. Au 13ème siècle, les Papes Grégoire IX et Innocent IV condamnèrent le Talmud pour contenir toutes sortes de blasphèmes contre la vérité chrétienne. Ils ordonnèrent que le livre soit brûlé car ils l’accusaient de « répandre toutes sortes d’hérésies horribles ».
Plus tard, le Talmud fut condamné par de nombreux autres Pontifes romains : Jules III, Paul IV, Pie IV, Grégoire XIII, Clément VIII, Alexandre VII, Bénédict XIV et d’autres, qui publièrent de nouveaux Index des Livres Interdits, conformément aux dispositions des Pères du Concile de Trente, et c’est encore le cas à notre époque (dix-neuvième siècle).
Distribution du Talmud durant les troubles
Au début du XVIème siècle, lorsque la paix de l’Eglise fut perturbée par de nouvelles religions (le protestantisme), les juifs commencèrent à distribuer le Talmud ouvertement, grandement aidés par l’art nouvellement apparu de l’imprimerie. La première édition du Talmud complet, contenant tous ses blasphèmes contre la religion chrétienne, fut publiée à Venise en 1520. Pratiquement tous les livres juifs publiés au seizième siècle, qui fut pour eux un siècle faste, sont complets et authentiques.
Vers la fin du XVIème et le début du XVIIème siècles, lorsque de nombreux hommes célèbres entreprirent d’étudier très sérieusement le Talmud, les juifs, craignant pour eux-mêmes, commencèrent à en expurger les chapitres. Ainsi le Talmud publié à Bâle en 1578 a été censuré en de nombreux passages.
Lors d’un Synode de l’Eglise, réuni en Pologne en 1631, les rabbins d’Allemagne et de nombreux autres pays déclarèrent que rien de ce qui pourrait vexer les Chrétiens et causer la persécution d’Israël (par contrecoup) ne devrait être imprimé. C’est pour cette raison que les ouvrages juifs publiés par la suite sont très incomplets. Les rabbins expliquent de mémoire ce que ces informations manquantes signifiaient, bien qu’ils possèdent encore les ouvrages originaux, plus anciens et complets, auxquels il est extrêmement rare que les Chrétiens aient accès.
Néanmoins, des livres juifs furent publiés, plus tard, avec très peu de mutilations, en Hollande, où les juifs expulsés d’Espagne furent bien accueillis. Le Talmud publié en Hollande en 1644-1648 est presque similaire à la version vénitienne.
Le dernier truc inventé pour tromper les censeurs fut l’introduction du mot haiah (« était ») dans certains endroits du texte, afin d’indiquer où se trouvaient les passages censurés. Mais, ce faisant, ils ne faisaient que nettoyer l’extérieur de la tasse. Car, en maints passages, ils ne peuvent s’empêcher de montrer ce qu’ils veulent cacher, en utilisant des mots comme « gam attah » (‘encore maintenant’ ; pour indiquer que cette loi est encore en vigueur) ; et « aphilu bazzeman hazzeh » (‘même jusqu’à ce jour’ ; indiquant que « cette loi tient toujours »), et autres ficelles du même acabit.
Nous devons ajouter quelques remarques encore, au sujet du livre des juifs très connu, appelé le Zohar. D’après certains rabbins, Moïse, après avoir été instruit de l’interprétation de la loi sur le Mont Sinaï, ne transmit pas cette information à Joshua ni aux Sages, mais à Aaron, Aaron la transmit à Eleazar et ainsi de suite, jusqu’à ce que ces
enseignements oraux aient été mis par écrit sous la forme d’un livre appelé le Zohar, qui tire son nom du verbe zehar, « briller ».
Il s’agit en effet d’une illustration des livres de Moïse, commentaire du Pentateuque. On a dit que l’auteur en était le Rabbi Schimeon ben Jochai, un disciple du Rabbi Akibha qui, cinquante ans après la destruction du Temple, mourut en martyr aux environ de l’an 120 après JC, lors de la guerre menée par l’empereur Hadrien contre les juifs.
Toutefois, les noms d’hommes qui ont vécu bien des siècles plus tard apparaissant dans ce livre, et étant donné que ni Rambam (le Rabbin Mosche ben Nachman) ni le Rabbin Ascher, qui sont morts aux environs de l’an 1248, ne le mentionnent, il est vraisemblable que ceux qui affirment que le Zohar serait apparu à la fin du treizième siècle sont plus près de la réalité. Cela est d’autant plus vraisemblable qu’environ à la même époque est apparu un livre similaire quant au contenu et au style proche de la manière chaldéenne. Le Zohar comporte trois gros volumes in octavo.
Source : Justin Bonaventure Pranaitis (1861-1917) ( IMPRIMATUR, St Petersburg, 13 avril 1892, Kozlowsky, Archevêque Métropolite de Moghileff.)