La démocratie chrétienne, c’est L’Église et le peuple, ils sont faits pour s’aimer. Jésus est venu évangéliser les pauvres. Les pauvres ont les premiers accueillis l’Évangile. Saint Paul disait aux premiers chrétiens :
« Vous n’êtes pas beaucoup de riches et de puissants. »
Les païens reprochaient à l’Église de s’adresser de préférence au peuple. Elle accepte le reproche. L’Eglise aime les petits, parce qu’elle est compatissante. Les petits aiment l’Église, parce qu’ils sont reconnaissants. C’est la seule force qui puisse dire efficacement au césarisme : ” tu respecteras la liberté ; au capitalisme : tu respecteras la justice ; au riche : tu pratiqueras la charité. “
Quand la royauté voulut revenir au césarisme et supprimer toutes les libertés populaires, elle sépara
le peuple de l’Église. François Ier supprima les confréries et la juridiction ecclésiastique. Louis XIV fit décider par un concile de courtisans que l’Église n’avait rien à voir aux choses civiles.
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Depuis lors la séparation s’est toujours accentuée. Deux facteurs puissants y contribuaient : César et Machiavel. César, c’est le pouvoir civil, qu’il s’appelle royauté, empire ou république. Dès lors qu’il n’est pas chrétien et qu’il s’inspire du droit antique, il veut dominer le peuple sans partage et il lui ravit la protection de l’Église et le secours des associations. Le pouvoir aime à se trouver seul en face d’un peuple sans cohésion et sans force.
Un second facteur de la désunion, c’est Machiavel, c’est la politique sectaire des Loges. Il n’y a pas là de principes, mais des intérêts et des passions. On veut régner pour y trouver son profit, on veut exclure l’Église par passion antireligieuse. César est gallican, les Loges sont anticléricales. César et les Loges mènent un jeu serré pour empêcher la réconciliation de l’Église et du peuple.
Le peuple manque à l’Église, parce que la charité et l’apostolat souffrent de ne pas se répandre. L’Église manque au peuple, parce qu’elle le délivrerait de toute servitude politique et économique.
Cependant, ils n’arrivent pas à se rencontrer. Une partie des ministres de l’Église s’est laissée endormir par le gallicanisme politique et n’a plus cherché suffisamment le peuple. Celui-ci s’est laissé tromper par les déclamations intéressées de César et de Machiavel. Ceux-ci pour empêcher le peuple de découvrir leur tyrannie lui criaient que la tyrannie venait de l’Eglise.
Cependant le représentant de Dieu sur la terre veille toujours. Pie IX a dit :
« Il faut que l’Église et le peuple se rencontrent, ce sera l’aurore de beaux siècles »
Léon XIII a donné les conditions de l’alliance de l’Église et du peuple dans l’Encyclique Rerum novarum et il a donné un nom à ce traité de paix, il l’a appelé la Démocratie chrétienne en disant à Mgr l’évéque de Liège :
« Il y a un mouvement démocratique universel, il faut le rendre chrétien pour qu’il ne devienne pas socialiste. »
Il faut au peuple un mot qui résume clairement un programme. Le mot qui ramène le peuple à l’Église, c’est la démocratie chrétienne.
Rerum Novarum :
Le problème n’est pas aisé à résoudre, ni exempt de péril. Il est difficile, en effet, de préciser avec justesse les droits et les devoirs qui règlent les relations des riches et des prolétaires, des capitalistes et des travailleurs. D’autre part, le problème n’est pas sans danger, parce que trop souvent d’habiles agitateurs cherchent à en dénaturer le sens et en profitent pour exciter les multitudes et fomenter les troubles.
Quoi qu’il en soit, Nous sommes persuadé, et tout le monde en convient, qu’il faut, par des mesures promptes et efficaces, venir en aide aux hommes des classes inférieures, attendu qu’ils sont pour la plupart dans une situation d’infortune et de misère imméritées.
Le dernier siècle a détruit, sans rien leur substituer, les corporations anciennes qui étaient pour eux une protection. Les sentiments religieux du passé ont disparu des lois et des institutions publiques et ainsi, peu à peu, les travailleurs isolés et sans défense se sont vu, avec le temps, livrer à la merci de maîtres inhumains et à la cupidité d’une concurrence effrénée. Une usure dévorante est venue accroître encore le mal. Condamnée à plusieurs reprises par le jugement de l’Église, elle n’a cessé d’être pratiquée sous une autre forme par des hommes avides de gain et d’une insatiable cupidité. À tout cela, il faut ajouter la concentration entre les mains de quelques-uns de l’industrie et du commerce devenus le partage d’un petit nombre d’hommes opulents et de ploutocrates qui imposent ainsi un joug presque servile à l’infinie multitude des prolétaires.
Les socialistes, pour guérir ce mal, poussent à la haine jalouse des pauvres contre les riches. Ils prétendent que toute propriété de biens privés doit être supprimée, que les biens d’un chacun doivent être communs à tous, et que leur administration doit revenir aux municipalités ou à l’Etat. Moyennant ce transfert des propriétés et cette égale répartition entre les citoyens des richesses et de leurs avantages, ils se flattent de porter un remède efficace aux maux présents.
Mais pareille théorie, loin d’être capable de mettre fin au conflit, ferait tort à la classe ouvrière elle-même, si elle était mise en pratique. D’ailleurs, elle est souverainement injuste en ce qu’elle viole les droits légitimes des propriétaires, qu’elle dénature les fonctions de l’Etat et tend à bouleverser de fond en comble l’édifice social. De fait, comme il est facile de le comprendre, la raison intrinsèque du travail entrepris par quiconque exerce un métier, le but immédiat visé par le travailleur, c’est d’acquérir un bien qu’il possédera en propre et comme lui appartenant. La suite
Source : Catéchisme Social – Léon Dehon 1898