En voyant des Pères Noël à chaque coin de rue et à chaque caisse, des sapins de Noël ornant chaque lieu public, des lumières clignotantes et « Joie dans le monde » résonnant de toutes parts, nous avons tendance à oublier les contextes historiques des Écritures qui situent les prophéties et les récits de naissance du Sauveur.
Isaïe a parfaitement décrit sa propre époque et celle de Jésus en décrivant des gens marchant dans les ténèbres et habitant une terre de tristesse, des gens qui souffraient sous la verge d’un surveillant : traités comme des bœufs attelés, appréciés pour leur travail et leurs impôts, des gens dont la personne avait cessé d’importer. Il y avait peu de prospérité ou de joie pendant que Marie et Joseph cheminaient sur les 90 milles qui séparaient Nazareth de Bethléem.
Le recensement qui les a mis en route, historiquement vérifiable ou non, symbolisait la subjugation du peuple à un empire païen. (Israël avait appris qu’un recensement de sa propre initiative était sacrilège, car il démontrait que le roi compterait sur sa force brutale – armées et impôts – plutôt que sur la providence de Dieu.) Dans le récit de la naissance de Luc, qui comprend l’Annonciation et la Visitation, le voyage à Bethléem et le manque de place à l’auberge sont la version du récit poétique du prologue de l’Évangile de Jean, qui parle du Verbe éternel devenant chair et étant rejeté par les siens.
Il semble que chaque époque, chaque siècle de l’histoire humaine, doit se lamenter de sa part de ce qu’Isaïe décrivait comme des bottes qui piétinent dans la bataille et des manteaux trempés de sang. Mais cela n’est pas agréable à penser.
En cette période de l’année, nous préférerions que la télévision nous montre moins de guerres. Néanmoins, nous passerons à côté du message évangélique de Noël si nous nous laissons endormir dans une paix céleste.
Jésus est né dans des circonstances désespérées. Ses parents, comme les 100 millions de personnes contraintes de se déplacer aujourd’hui, n’avaient pas d’assurances, pas de GPS, pas de cartes de crédit… Sans moyens face aux difficultés et dangers omniprésents, ils étaient dépendants, espérant la bienveillance des étrangers.
En cela, Marie et Joseph étaient des icônes de Dieu et de l’enfant qu’ils s’apprêtaient à recevoir dans le monde. Le Créateur n’a pas exercé le pouvoir et la puissance, mais a mis l’univers sur une voie d’évolution dans laquelle l’amour divin prendrait un jour chair et devrait compter sur la bonne volonté des personnes au cœur généreux.
Nous devons nous rappeler que Dieu n’a pas fait cela pour confondre les confortables, mais pour apporter la joie aux nécessiteux. Dans la version de Luc de l’histoire, ni les chefs religieux ni les riches représentés par les Mages n’ont remarqué les signes de leur époque.
Qui a remarqué? Les bergers, des gens à la réputation douteuse, non lavés et incapables d’observer les lois religieuses, ils ont pris à cœur le message des anges. Ceux-ci, malgré leur peur, ont quitté leurs 99 (plus ou moins) et se sont hâtés vers Bethléem pour voir « ce que le Seigneur leur avait fait connaître. » Ensuite, les bergers sont devenus les premiers évangélistes, « rendant gloire à Dieu et faisant connaître le message.«
Pour les chrétiens, l’Incarnation est le point culminant de la création. Tout l’univers existe de Dieu; Dieu est présent d’une certaine manière en tout grâce à l’amour divin. Maintenant, nous pouvons comprendre l’Incarnation comme l’essence, l’expression la plus concrète de la révélation de l’amour divin et notre image la plus claire de ce à quoi ressemble Dieu. Et avec cela, l’histoire devient plus exigeante.
Quand les anges sont apparus aux bergers, ils ont dit : « Vous trouverez un nourrisson enveloppé de langes.«
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Cette scène très ordinaire se révèle être une théophanie scandaleuse ; la plus grande auto-révélation de Dieu est la divinité en couches. Les icônes byzantines traditionnelles de la Nativité le représentent en montrant le nourrisson emmailloté dans une mangeoire qui pourrait aussi représenter un cercueil, ses linges d’emballage comme ceux utilisés pour l’inhumation.
Dans les mots de la théologienne Sr. Elizabeth Johnson, l’Incarnation « accomplit le genre d’amour divin qui… entre empathiquement dans l’expérience [humaine], s’identifiant avec la gloire et l’agonie de la vie humaine de l’intérieur, se liant même avec les impies et les abandonnés de Dieu.«
Le message évangélique de Noël est simplement cela. Dieu désire être avec nous, Dieu nous aime profondément et respectueusement assez pour partager notre vie mortelle. De cet amour, Dieu est devenu vulnérable à nous, n’imposant jamais mais nous invitant à une union possible uniquement lorsque Dieu entre dans la vie humaine.
Le bébé enveloppé de langes est un signe que Dieu exerce le pouvoir en tant qu’accompagnement fidèle, aimant et engagé dans la vulnérabilité. Et tout cela, pour nous inviter à devenir comme le Dieu qui habite parmi nous, cherchant à trouver une demeure en nous.
Cet article a été initialement publié par Ncr Online puis traduit par LeCatho | Lien original.