En l’année 1812, par une froide et sèche journée de février, un violent incendie éclata à Auray, dans la rue du Château.
Au son du tocsin, au bruit du tambour qui bat le rappel, les habitants se rendent en foule du côté du sinistre. Près de deux mille personnes se pressent dans la rue ; on commence la chaîne ; les pompes jouent sans relâche ; mais rien n’y fait, et l’incendie devient de plus en plus intense.
Déjà trois maisons sont entièrement consumées ; et les flammes, excitées par la sécheresse de la gelée et par la violence du vent, couvrent la ville d’étincelles et de flammèches ardentes. La fatigue et le découragement commencent à s’emparer de tous ; les pompes ne jouent plus, faute d’eau ; toute la ville va devenir la proie de l’incendie…
A ce moment apparaît le vénérable Recteur d’Auray, M. Deshayes, revêtu du surplis et de l’étole.
« Mes enfants, s’écrie-t-il, prions Sainte Anne ! Elle seule peut nous sauver »
Mais le feu ne s’éteint pas. Le saint prêtre, redoublant de foi, de confiance, d’énergie, s’écrie de nouveau de toutes ses forces :
« Prions encore, mes enfants ! prions ! — Oui, prions encore ! »
Et toute la foule, agenouillée de nouveau, invoque Sainte Anne avec un redoublement de ferveur. 0 prodige ! les flammes tombent tout à coup, bien que le vent ne cesse de souffler avec la même violence.
Partout le feu s’arrête, laissant apercevoir à la foule émerveillée les poutres, les boiseries, les meubles à demi consumés ; et lorsque les tourbillons de fumée ont tout à fait disparu, tout le monde aperçoit, au milieu des débris de l’incendie, sur un pan de muraille et à quelques pouces au-dessus d’un meuble qui avait été entièrement consumé, un grand tableau représentant sainte Anne parfaitement intact ; au milieu de cette chaleur d’enfer, le cadre n’a pas seulement été noirci, et le cristal est demeuré sans la moindre lésion !
Tout Auray fui témoin de cette merveille, et alla processionnellement au sanctuaire de Sainte-Anne, pour rendre grâce à sa Sainte et puissante protectrice.
L’efficacité de l’invocation de sainte Anne s’est manifestée maintes fois au milieu des incendies, et on en trouve bien des preuves dans les nouvelles Archives, aussi bien que dans les anciens monuments et ex-voto du pèlerinage.
Au moment où l’incendie sévissait avec le plus de violence, où les flammes, poussées par le vent, allaient tout dévorer autour d’elles, dès que l’on invoquait Sainte Anne, ou que l’on faisait vœu de faire un pèlerinage à son sanctuaire, le feu s’éteignait tout à coup, le vent tombait, et l’intervention de la puissante Patronne de la Bretagne apparaissait, évidente pour tous.
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Les nouvelles Archives contiennent à cet égard des procès-verbaux signés par quantité de témoins ; entr’autres, à l’occasion d’un grand incendie qui éclata à Calac, diocèse de Vannes ; de l’incendie de Gogrec, diocèse de Saint-Brieuc, le 14 octobre 1869 ; et de celui de Treviéven, sur la paroisse même de Pluneret, le 7 octobre 1870.
Source : Mgr de Ségur – Tome onzième – 1893