Le Seigneur demande la mortification du corporelle : « Ma fille, dit le Seigneur à Marguerite de Cortone, si tu veux suivre les traces de Madeleine et partager ses consolations, abandonne absolument tout ce qui peut plaire à ton corps…
Que tous ces membres, qui n’ont autrefois servi qu’à provoquer ma colère par l’usage criminel que tu en as fait, soient brisés, broyés comme on broie la paille pour en extraire le froment. » (Vie intime, ch. III & 1er.)
« Ma fille, lui dit un autre jour le Seigneur, tu diras à ton confesseur que les chrétiens, mes serviteurs, ne peuvent être parfaits en cette vie, s’ils ne mettent un frein à leur appétits grossiers. Sans abstinence, il est impossible de réprimer les assauts de la chair. Que ceux donc qui veulent la dompter en prennent le moyen en pratiquant la mortification des sens et du corps surtout. »
Notre-Seigneur avait commandé à Françoise de la Mère de Dieu de jeûner au pain et à l’eau tout l’Avent. Le samedi, veille de l’Avent, elle se sentit si faible qu’elle avait bien de la peine à jeûner comme la communauté. Dans l’appréhension d’une si longue abstinence, la nature en elle défaillait.
Les jours suivants, sa faiblesse augmenta de telle sorte qu’elle n’en pouvait plus :
Mon Seigneur, dit- elle, vous voyez bien que je n’en puis plus ; Est-ce votre volonté que je continue ?
– Notre-Seigneur lui dit :
« C’est moi, je le veux. Continuez à jeûner dans l’état où vous êtes. »
Et Il lui déclara qu’Il voulait qu’elle jeûnât encore au pain et à l’eau tout le carême suivant, quand même elle serait dans l’état où elle se sentait à présent. Je ne veux pas, lui dit-Il, ôter la peine que l’on a à faire ma volonté pour ne pas faire perdre le mérite que l’on a en souffrant pour m’obéir.
Elle passa encore un jour sans sentir plus de force, mais le lendemain Notre-Seigneur la fortifia.
Une autre fois qu’elle était exténuée et qu’elle continuait cependant les jeunes au pain et à l’eau que Notre-Seigneur lui avait prescrit, Il se présenta devant elle, paraissant extrêmement fatigué, et Il lui dit :
« Voyez comme je suis ; vous n’êtes pas encore aussi épuisée que moi ; j’ai voulu être en cet état pour vous donner force et appui en vos faiblesses ; puisez la force dans l’état où vous me voyez… »
Quelquefois, se sentant fort faible, la nature soupirait après quelqu’un de ces jours où elle ne devait point jeûner, afin de rétablir un peu ses forces. Mais il arrivait souvent le contraire. Une fois qu’elle avait fait deux repas, elle se sentit beaucoup plus faible et abattue qu’en un jour de jeûne ; sur quoi Notre-Seigneur lui dit :
« Vous expérimentez maintenant ce que vous servent vos industries et vos propres recherches ; voyez si vous pouvez compter là-dessus et si c’est un repas ou deux qui vous soutiennent. »
Elle avait la permission de porter quelques jours de la semaine un cilice. Une autre fois qu’elle était fort accablée de maux, la partie inférieure lui proposait de différer à un autre jour cette pénitence, puisqu’elle n’en avait point de fixé :
« Si vous voulez faire quelque chose pour moi, lui dit Notre-Seigneur, il faut que vous mettiez ce cilice sans différer, car vous ne savez pas ce qui peut vous arriver. »
Cette sainte âme était conduite, il est vrai, par des voies extraordinaires, et la prudence ne permettrait pas d’appliquer ces règles de conduite à des personnes qu’on ne saurait pas appelées à une vie aussi austère ; mais ces paroles du Sauveur montrent combien se trompent ceux qui écoutent toujours les réclamations de la nature et qui, cédant toujours à la crainte d’être incommodés, négligent la mortification.
Deux jours après Noël, comme Françoise entrait au chœur, le Saint Enfant Jésus lui dit :
« Ma sainte Mère avait grand soin de me nourrir, et vous, qu’est-ce que vous m’avez donné pour ma nourriture ? La nourriture que je veux de vous et de toutes celles auxquelles je me suis donné est un soin exact de retrancher les choses dont on a envie et où la nature prend vie et satisfaction ; ainsi, en se privant pour l’amour de moi, on me donne une nourriture agréable. »
Et une autre fois :
« Je me nourris de toute chose dont vous vous privez pour l’amour de moi ; votre jeûne sera ma réfection. »
Chercher les jouissances de la nature et servir Dieu est impossible
« Celui qui veut commencer une vie sainte par la tiédeur, dit la divine Sagesse à Henri Suso, verra bientôt ses bonnes résolutions s’évanouir. On quitte vite le bien que l’on entreprend avec négligence.
Celui qui pense vaincre son corps révolté et le sentir sous la loi de l’esprit, en vivant au sein des délicatesses, des satisfactions sensuelles, est un insensé dépourvu de toute espèce de jugement.
Vouloir jouir du monde et servir Dieu est une impossibilité dont la réalisation détruirait la morale et la parole de Jésus-Christ. Si tu veux me servir, il faut le faire avec courage et commencer ton œuvre en renonçant au monde et à toi-même. »
Le Seigneur donna à Anna-Maria Taïgi cette leçon :
« Le vrai soldat ne se fait point connaître quand il est assis en paix et respecté de tous ; chacun alors peut faire le soldat. Mais on le connaît lorsqu’il reste debout dans les veilles, qu’il se passe de manger, de boire, de dormir ; quand il combat fidèlement pour son souverain, de qui seulement, il attend la récompense. »
La bienheureuse Anne-Maria Taïgi entendit plus d’une fois le divin Maître lui dire que si la mortification du goût semblait peu importante à plusieurs, Lui l’agréait beaucoup ; que si l’on voulait obtenir la paix et les douceurs spirituelles, il fallait la pratiquer ; qu’en s’abandonnant à l’excès contraire, c’était Lui renouveler les amertumes de sa passion, les insultes et les abominations dont sa bouche divine fut alors l’objet.
Un jour, Notre-Seigneur encouragea Henri Suso à endurer le tourment de la soif, en lui disant :
« Rappelle-toi, Henri, combien fut terrible ma soif lorsque j’étais sur la croix, dans les dernières angoisses de la mort. Quoique je fusse le Créateur de toutes les fontaines, je n’ai pu obtenir alors pour me soulager que du fiel et du vinaigre. Supporte avec patience la soif que tu éprouves, si tu veux suivre mes traces. »
Jaccoponi, de l’ordre de saint François, voulant se punir d’un ardent désir de manger de la chair, suspendit dans sa cellule le morceau de chair qui avait été cause de sa tentation. Bientôt la mauvaise odeur se répandit dans les chambres voisines.
Le gardien l’enferma dans le lieu le plus infect du monastère. Jacoponi accepta ce châtiment avec joie. Alors Notre-Seigneur lui apparut et lui dit :
« Jaccoponi, je suis venu pour te récompenser d’avoir accepté cette punition par amour pour moi ; Demandes-moi la grâce que tu voudras et je te l’accorderai. »
– La grâce que je désire, c’est que vous me placiez en un lieu encore plus horrible, afin que je puisse y expier mes péchés, car celui où je me trouve ne l’est pas assez.
Dieu, en récompense de sa mortification, inonda son âme de consolation.
Jésus obligeait souvent la Mère Anne-Marguerite Clément, pendant qu’elle était supérieure à Montargis, à passer ses nuits en oraison. Parlant de ces heures de la nuit :
« Laisse moi agir à présent, lui disait-Il, car je suis ami du silence et de la paix. C’est la nuit que j’ai toujours choisie pour opérer mes plus grandes merveilles. Je veux que tu passes ce temps dans un hommage continuel devant moi, pour réparer par ton sacrifice non seulement les outrages et les insultes que je reçus la nuit qui précéda ma mort, mais encore pour ceux que je reçois à présent de la part des pécheur.
C’est aussi pendant la nuit que je me communique le plus aux âmes cachées qui sont dans un silence sans interruption à l’égard des créatures. Car je suis un Dieu jaloux qui ne souffre point de partage. »
Mais voulant quelquefois céder aux besoins de son épouse, il se servait de ces paroles du cantique :
« Ego dormio et cor meum vigilat … Dors si tu le peux, mon épouse, et moi qui suis ton cœur, je veillerai pour toi. »
François d’Assise, étant en oraison, entendit la voix de son Bien-Aimé :
« Mon fils, si tu veux connaître ma volonté, il faut que tu méprises et que tu haïsses ce que tu as aimé et désiré selon la chair. Que ce nouveau sentier ne t’effraie point, car si les choses qui te plaisent doivent te devenir amères, celles qui te déplaisent te paraîtront douces et agréables. »
À dater de ce jour, ce qui semblait à François le plus amer se changea pour lui en douceur, pour l’âme et pour le corps.
Dans une occasion où Sainte Marguerite-Marie, étant encore novice, avait peine à se soumettre, son divin Maître lui fit voir son sacré Corps couvert des plaies qu’Il avait souffertes pour son amour, lui reprochant son ingratitude et lâcheté à se vaincre, pour l’amour de Lui.
Que voulez-vous donc, mon Dieu, que je fasse, puisque ma volonté est plus forte que moi ? Il lui dit que, si elle mettait cette volonté dans la plaie de son sacré Côté, elle n’aurait plus de peine à se surmonter.
O mon Sauveur, dit-elle, mettez-l’y si avant et l’y enfermez, si bien que jamais, elle n’en sorte.
Elle avoua que dès ce moment tout lui parut si facile qu’elle n’eut plus de peine à se vaincre.
Notre-Seigneur apparut à sainte Rose sous la forme d’un lapidaire : il lui remit plusieurs pierres précieuses à tailler et à polir. Comme elle objectait le peu de force de ses mains habituées à manier l’aiguille et le fuseau, Jésus sourit :
« Ne croyez pas, dit-Il, être la seule femme que j’occupe à ce travail. »
Il fit alors paraître devant ses yeux un vaste atelier de jeunes vierges qui, armées de ciseaux, de maillet et de scies, taillaient des blocs de marbres et de porphyre et amollissaient la pierre dure en la mouillant de leurs larmes. Ces vierges étaient parées comme pour prendre part à un festin, et Rose, s’approchant d’elles pour mieux juger de la perfection de leur travail, s’aperçut qu’elle-même portait une parure semblable.
Une lumière se fit en elle, lui révélant que cette opération de la taille et de la sculpture des pierres représentaient les peines, les efforts et les larmes que coûtent l’acquisition des vertus et l’achèvement de la beauté d’une âme.
Se trouvant tout épuisée d’un travail long et pénible, la bienheureuse María Crescencia Pérez pria le Seigneur de lui permettre d’appuyer un peu les mains sur la grille de chœur. Elle entendit alors ces paroles :
« Mon enfant, ce n’est pas ici le temps du repos. »
Un jour que, fatiguée, Bénigna s’était assise pendant l’oraison, Jésus lui dit :
« Ceux qui m’ont accompagné au Calvaire avaient-ils porté un siège avec eux ? »
Une autre fois, Il lui dit :
« Quand tu es lasse, unis ta lassitude à la mienne. Lorsque je tombais en gravissant le Calvaire, on me donnait des coups de pied pour me faire avancer. »
Saint Roch, de Montpellier, pendant la peste, se voua au service des malades. Une nuit, il entendit ces paroles :
« Roch, vous avez supporté jusqu’à présent de très grands travaux pour l’amour de moi ; il faut maintenant que vous souffriez aussi d’extrêmes douleurs, dans la vue de celles que j’ai endurées pour vous. »
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Le saint, en proie à de terribles souffrances, fut soulagé par divers moyens ; mais lors qu’il fut guéri, il entendit encore une voix lui dire :
« Roch ! Roch ! j’ai exaucé votre prière et je vous ai rendu la santé ; retournez maintenant en votre pays et y pratiquez les exercices de la pénitence, afin que vous puissiez avoir place dans la compagnie des saints. »
Source : Recueil d’Apparitions de Jésus aux Saints et aux Mystiques – Abbé Auguste Saudreau
Merci.